Soro Néhélo fait partie de la troisième génération de reporters- photographes, qui ont fait les beaux jours du quotidien progouvernemental “Fraternité Matin”. Originaire de Sinématiali, au Nord de la Côte d’Ivoire, il est né le 1er janvier 1948 à Ziénadorikaha.
Fils de cultivateur, Soro Néhélo est l’aîné d’une famille de quatre enfants comprenant trois garçons et une fille. En partance pour le service militaire en Indochine, son oncle Sonrona Albert adjudant-chef au sein de l’Armée française, le confie à son ami Marie Joseph Tiandanga, un catéchiste. C’est ce dernier qui va l’inscrire à la Mission catholique de Sinématiali, où il fait son cycle primaire. Malheureusement, il s’arrête pour des raisons familiales en classe de CM1 et retourne au village.
De retour de formation, son oncle le fait inscrire à nouveau à l’école primaire de Sédiogo, située à 7 km de leur village. Il reprend les classes de CE1, CE2 et CM1 et obtient en 1962, son Certificat d’Etudes primaires élémentaires (CEPE). Il perd son oncle le jour même de la proclamation des résultats. Vu son âge avancé, il n’arrive pas à passer le test d’entrée en sixième.
C’est ainsi que le destin conduit Soro Néhélo à Bouaké pour les grandes vacances, sur invitation du père d’un élève de CP1 qu’il protégeait. Etant sans qualification, il exerce plusieurs petits métiers dont celui de majordome. Quelques années plus tard, il est recruté, par une société agricole, comme livreur de sacs de farine dans les boulangeries. Sachant lire et écrire, il est nommé chef-adjoint et devient au fil des années, contrôleur de produits agricoles, grâce à sa grande capacité d’assimilation.
Un jour, il croise un grand frère d’un village voisin en la personne de Laurent Dona Fologo. Celui-ci lui propose de venir à Abidjan. Il profite de ses vacances en 1967, pour le faire. « A mon arrivée, le président Fologo, comme on l’appelait à l’époque, voulait que je vive chez lui. Mais j’ai préféré rester à Attécoubé chez Coulibaly Gnénéma, un grand frère du village », dit-il. En quête d’emploi, il passe, en 1968, le concours de conditionneur de produits agricoles. Admis, son instinct le décourage. « Je me disais qu’en allant travailler au Port autonome d’Abidjan, on pouvait se séparer de moi du jour au lendemain, au cas où un problème surviendrait. Mon souhait était d’avoir un métier que je pouvais exercer à tout moment », explique Soro.
Sa rencontre avec la photographie
Se rendant très souvent à “Fraternité Matin” pour voir son grand frère Fologo, Soro Néhélo tombe un jour sur Emmanuel Nado. Un grand reporter photographe, qui sortait d’une voiture de reportage dans la cour de "Fraternité Matin". Impressionné par le style et la personnalité de ce dernier, il décide de devenir comme lui. Deux mois plus tard, Fologo le confie à Jacob Adjobi, à l’époque chef du service photo. Ce dernier le met à la disposition du chef laborantin Koua Kadjo Jacques, pour sa formation. Le jeune Néhélo est embauché à "Fraternité Matin" le 1er août 1969. Il commence sa carrière au laboratoire photo. Ensuite, il est affecté au service des archives, au sein duquel il fait ses preuves. Avant d’être nommé chef du labo photo, en remplacement de Koua Kadjo.
« Au Congrès du PDCI RDA de 1970, Jacob Adjobi a fait une photo de la salle de séance, dans laquelle était assis le Président Houphouët, le ministre Philippe Yacé et tous les autres membres du bureau politique de ce parti. De retour à la rédaction, il m’a remis la pellicule. Pendant que je la développais, j’ai repéré une photo du Président Houphouët, dans laquelle il avait la main levée. Je l’ai extraite et c’est cette photo qui a fait la Une du journal. Cela m’a vallu l’admiration des responsables et de tout le personnel de Frat-Mat », se souvient-il.
Devenu reporter plus tard, Soro Néhélo se rend, en 1974, au Centre de Formation Technologique de Gobelin en France, pour se perfectionner. Il revient, en 1978, pour continuer sa carrière jusqu’en 2002, année au cours de laquelle il prend sa retraite, après avoir servi à "Fraternité Matin" pendant près de 35 ans.
73 ans et toujours accroché à la photographie
« Je continue de faire de la photographie. Mes temps libres, je les consacre à ma famille et aux activités de mon village. Je suis conseiller formateur de l’Union nationale des Photographes et Caméramen de Côte d’Ivoire (UNPHOCAP-CI). J’interviens souvent dans des écoles de journalisme, pour la formation de leurs étudiants », confie-t-il.
Chevalier dans l’ordre du Mérite sportif, Officier dans l’ordre du Mérite ivoirien, Grand Médaillé d’honneur du travail, Officier dans l’ordre du Mérite de la Communication et des Médias, El Hadj Soro Néhélo rêve de créer une école de photographie. Il est marié et père de 6 enfants dont 2 garçons et 4 filles.
Boubakar Barry