C’est l’une des phrases marquantes de la déclaration de la Conférence épiscopale nationale du Cameroun au sujet du scrutin présidentiel du 12 octobre dernier et de son déroulement.
Dans une déclaration par son président Monseigneur Andrew Nkea, la conférence épiscopale se félicite exprime néanmoins sa « satisfaction pour les efforts fournis par Elections Cameroon (ELECAM) pour que le vote se passe dans la sérénité ».
Mais elle note selon ses propres termes, « certaines irrégularités qui entravent sérieusement notre marche vers la démocratie. »
En Avril 2024, l’Assemblée plénière de la Conférence Épiscopale Nationale du Cameroun a rappelé à tous les concitoyens la nécessité de s’inscrire pour l’élection présidentielle d’octobre 2025 et les élections régionales qui devaient suivre. Au mois de mars dernier, et le vingt-cinquième jour de l’année en cours, les Évêques du Cameroun ont publié une Lettre pastorale sur l’élection présidentielle dont le contenu reste et restera d’actualité pour toute personne de bonne volonté. L’heure a ensuite été à la remise à niveau mais aussi à la formation de nos fidèles que nous voulions comme observateurs des élections en général.
A l’approche de l’échéance de l’élection présidentielle, la même Conférence des Évêques, à travers son Service National « Justice et Paix », a demandé à Monsieur le Ministre de l’Administration Territoriale 307 accréditations pour l’observation de ladite élection; et il en a donné 202. Les observateurs, malgré le nombre réduit, ont pu se déployer sur toute l’étendue du territoire, avec l’aide des différentes coordinations « Justice et Paix » des diocèses.
Les 202 observateurs ont couvert douze mille deux cent cinquante-sept (12 257) bureaux de vote sur trente un mille six cent trente-cinq (31 635) soit 39% présents dans les 10 régions du pays.
Sur la base de ce qui a été observé le jour du vote, nous tenons à faire part de notre satisfaction pour les efforts fournis par Elections Cameroon (ELECAM) pour que le vote se passe dans la sérénité. Les sites et les bureaux de vote étaient bien connus des électeurs et accessibles dans leur grande majorité. Les lieux étaient sécurisés par les forces de l’ordre, notamment la police et la gendarmerie sans armes. A l’extérieur des bureaux de vote, l’atmosphère était calme et sereine. A l’intérieur de chaque bureau de vote, l’urne était scellée et transparente; elle était suffisamment visible pour le public; l’isoloir était disposé de manière à assurer la discrétion et à préserver le secret du vote. Nous saluons l’exemple de civilité démocratique dont ont fait preuve les assesseurs en poste dans la plupart des bureaux de vote. S’agissant toujours du jour du vote, nous avons apprécié le décompte public des voix des électeurs dans la plupart des bureaux de vote.
Si le jour du vote, l’on a pu observer une atmosphère de calme dans l’ensemble du pays, notre rapport global sur l’observation de l’élection présidentielle du 12 octobre fait aussi état de certaines irrégularités qui entravent sérieusement notre marche vers la démocratie.
Il a été constaté que le procès-verbal préparé par ELECAM est signé par les représentants des partis présents dans le bureau de vote sur la première et la dernière pages et non sur les pages du milieu qui portent le décompte des voix tels que publié dans le bureau de vote ;
Notre observation a aussi relevé ce qui suit : – Taux d’abstention élevé (cas de Kribi 1 et 2, Lycée de Tsinga, Matamfen Supérieur…); – Délocalisation de certains centres de votes; – Non actualisation du fichier électoral dans lequel se trouvent les noms des personnes décédées; – Certaines poubelles étaient disposées de manière à permettre à l’électeur de voir les bulletins jetés par l’électeur précédent, ce qui était de nature à influencer le vote; – A Douala, Yaoundé, Maroua, Garoua, Bertoua, certains électeurs sont sortis avec les bulletins des candidats qui n’étaient pas de leur choix; – On note également des cas des bureaux qui existent sur le terrain mais qui sont absents sur la liste officielle d’ELECAM; – Il a été constaté un incident dans la ville de Garoua, où suite à une intervention des forces de l’ordre sur le convoi du Candidat Issa TCHIROMA BAKARY qui revenait de son bureau de vote, des échauffourées entre les forces de l’ordre et les jeunes ont entraîné de graves blessures sur un élément des forces de police et l’incendie d’un camion de la gendarmerie; – En dehors du jour du vote, nous avons aussi constaté d’autres scènes de violence dans les villes de Dschang et de Douala.
S’agissant du dépouillement et de la publication des résultats de vote par bureau, étape contemplée par l’article 113 du Code électoral, nos observateurs ont noté que ces opérations ont globalement commencé à 18 heures, en présence des membres des Commissions Locales de Vote, des Scrutateurs recrutés parmi les électeurs inscrits sur les listes des bureaux et de quelques observateurs et électeurs.
Les résultats de chaque candidat ont été rendus publics dans les 12 257 bureaux de vote que nous avons observés. Le dépouillement étant public, les électeurs se sont reconnus dans les votes comptabilisés et sont repartis globalement satisfaits. À leur sortie, ils ont exprimé l’espoir de se reconnaître dans les résultats qui seront publiés par le Conseil constitutionnel et que rien ne sera modifié par les autorités impliquées dans cet exercice. Comme indiqué dans la Lettre pastorale des évêques citée plus haut, notre prière est qu’avec l’aide de Dieu et l’engagement de tous, notre pays connaisse la paix et la stabilité dans la vérité, et en ressorte plus fort, grâce aux contributions de millions de Camerounais, à travers leur travail quotidien et leur amour pour la patrie. En attendant tous les résultats des élections, nous nous souvenons de la parole du Christ : « Et Veritas liberabit vos Et la vérité vous rendra libres ».
Andrew Nkea Fuanya Archevêque de Bamenda et Président de la CENC Président de la Commission Justice et Paix