« Vous payez cash ou par mobile money ? », demande le chauffeur à l'un de ses passagers. Celui-ci répond : « Mobile money ; je n’ai pas de monnaie ». Cette conversation illustre bien l’intégration du mobile money dans le transport en commun. C’est la monnaie digitale dont l’outil principal est le téléphone portable.
Longtemps utilisé pour communiquer, le portable est devenu un portefeuille numérique. « Aujourd’hui avec le téléphone on fait tout y compris les achats. Pour se déplacer, il faut avoir un compte mobile money garni. Ça peut te sauver en cas de manque de monnaie en espèce ou de liquidité », prévient Mohamed.
Dans le secteur du transport en commun, à Abidjan et à l’intérieur du pays, les chauffeurs et les passagers utilisent la monnaie numérique. Les sociétés de téléphonie mobile et plusieurs entreprises de la fintech ont développé des applications pour cela. Le procédé est simple. Il suffit de rapprocher deux téléphones disposant de code Quick Response (QR), ou rapprocher le téléphone d'une carte avec ce code. On scanne le code. En un clin d’œil, c’est fini. On a déjà payé 200 francs pour son transport. C’est une innovation.
Simplicité et rapidité du paiement
C’est la monnaie digitale. Elle représente ainsi l’avantage de la simplicité et la rapidité du paiement. Son utilisation est fréquente dans les wôrôwôrô, taxis collectifs intercommunaux. « J’ai toutes les applications de paiement. Ça met tout le monde à l’aise. C’est simple et rapide. On scanne le code, c’est tout. Il n’y a plus de problèmes de monnaie », explique le chauffeur. Un passager partage son avis. « Depuis que ces applications existent, je ne me casse plus la tête pour la monnaie. Je me connecte pour payer tranquillement ».
En outre, en payant via le digital, notre argent a une sécurité et une traçabilité d’utilisation. « Pour connaître ma recette du jour, je n’ai qu’à regarder dans mon application. Mais, si c’est en liquidité, je suis obligé de garer pour faire le point. Ça prend du temps », affirme Daou, un chauffeur wôrôwôrô. « Avoir son argent dans son téléphone, c’est plus sécurisé que de l’avoir en liquidité. Heureusement qu’il n’y a plus de frais supplémentaires dans le paiement », se réjouit Koffi M.
L’autre face de la médaille
Mais pour faire un paiement digital, il faut un minimum de niveau d’alphabétisation. « Moi, je ne sais pas lire ni écrire. C’est que je risque de rester à la maison », a réagi une commençante. Cela illustre l’autre face de la médaille : le risque d’exclure une partie de la population qui n’a pas l’habitude des outils numériques. Pour Sana Amidou, un salarié, « il faut s’adapter. On a les moyens aujourd’hui d’apprendre à lire et écrire. Ce mode de paiement va s’imposer dans l’avenir. Il arrivera un moment où on verra difficilement la liquidité. On n’a pas le choix. On doit aller avec la technologie », soutient-il.
Autres difficultés, c’est l’obligation d’avoir une connexion internet et le risque d’être exposé à des vols ou erreurs de transactions. « Si tu n’as pas de connexion internet, ou qu’il y a un problème de réseau, ce paiement ne peut pas fonctionner. C’est tout ça qui rend ce mode complexe », affirme J. K. C’est pour ces inconvénients que certains chauffeurs sont encore réticents. « Le client dit qu’il a payé, or toi tu n’as rien reçu sur ton compte. J’ai eu une discussion avec des clients sur ça. Un autre jour, un client s’est trompé pour me payer 700 francs au lieu de 500 francs. Je n’avais pas d’argent en espèce et encore moins de connexion pour lui ramener la différence. A cause de tout ça, j’ai arrêté d’utiliser ces applications », explique un chauffeur.
Au regard des avantages et inconvénients liés à l’usage de la monnaie digitale dans le transport en commun, il serait mieux de maintenir les deux formes de paiement que sont le cash et le numérique. Ce que fait ce chauffeur : « Moi j’accepte le paiement en cash ou digital. Le passager est le roi. C’est lui qui choisit », indique-t-il.
Mohamed I koné