A Bonoua, ville située au Sud-Est d’Abidjan, des comportements inciviques de certaines personnes dégradent des installations publiques telles que les canaux d’évacuation d’eaux usées et de ruissellement. Ces pratiques sont généralement l’œuvre de vendeurs installés aux abords de ces caniveaux et tendent à polluer le cadre de vie de l’ensemble des populations.
C’est sous de fines gouttes de pluie que nous effectuons une marche lente le long de la route principale qui traverse la ville, plus précisément aux alentours de la gare routière, principal lieu d’attroupement ; il est environ 15 heures, ce jeudi 5 juin 2025. Tout à l’air normal : Des voyageurs vont et viennent entre les bruits des klaxons à répétition des taxis communaux, des tricycles, des vendeuses ambulantes qui interpellent de potentiels clients, et les entrées et sorties des véhicules de transport en commun. Pourtant, à côté de tout ce brouhaha, un fait attire notre attention ou du moins, nos regards. Il s’agit de l’état du caniveau servant à l’évacuation des eaux de ruissellement qui a été transformé en dépotoir par les vendeurs et vendeuses installés aux abords de la route.
Pollueurs permanents
Installés aux abords de ce grand caniveau, des commerçants et commerçantes qui produisent des déchets de toutes sortes. Un vendeur de noix de coco frais, assis juste à l’entrée de la gare, jette directement ses déchets dans le caniveau sans se soucier de savoir où iront ces déchets et quelles conséquences cet acte peut avoir sur l’environnement. Non loin de lui, des vendeuses de maïs et d’attoupkou (mets obtenu à partir de semoule de manioc cuit à la vapeur, mais différent de l’attiéké). Ces vendeuses produisent l’attoupkou sur place ; de l’épluchure du manioc à la cuisson en passant par le lavage et la mixture. Les déchets produits par tout ce processus sont déversés dans ce même caniveau. A ces pollueurs permanents s’ajoutent d’autres, de passage ou travaillant à l’intérieur de la gare qui se servent de ce caniveau comme toilettes en y urinant à longueur de journée.
A la question de savoir pourquoi est-ce qu’elles jettent les ordures dans le caniveau et si elles avaient une idée des conséquences que cela a sur l’environnement, une vendeuse de maïs hausse simplement les épaules, ne sachant quoi répondre. Il faut néanmoins souligner qu’une benne à ordures est installée non loin de là mais certaines de ces ordures se retrouvent dans le caniveau.
En continuant à longer la route principale, mais cette fois du côté opposé à la gare, un peu plus vers le rond-point, un autre caniveau plus étroit, est complètement bouché. Bien qu’il soit recouvert, on peut apercevoir de l’eau stagnante qui en déborder légèrement. On retrouve des déchets en plastique qui y ont été déversés par les populations riveraines et les commerçants installés en bordure. Visiblement, ce caniveau n’a pas été curé depuis longtemps, mais cela n’a pas l’air de déranger puisque les gens vont et viennent sans y prêter attention.
L’entretien de la ville est confié à une entreprise privée
Au téléphone avec un agent de la mairie de Bonoua, nous essayons de comprendre pourquoi ces commerçants continuent à agir ainsi sans être inquiétés et pourquoi certains des caniveaux de la ville ne sont pas curés. Notre interlocuteur nous fait savoir que c’est cette année qu’un service d’hygiène a été mis en place au niveau du service technique. Il explique qu’avant de mettre en place ce service, des volontaires avaient été envoyés dans les ménages, dans les restaurants et sur les routes, pour sensibiliser les personnes sur la manière de trier les ordures et comment les disposer pour la collecte. « Concernant l'entretien de la ville, il a été confié à une entreprise privée. C’est elle qui recrute les femmes que vous voyez sur les routes en train de balayer » confie l’agent de mairie. Selon lui, la mairie a signé un contrat avec cette entreprise privée de nettoyage pour maintenir les rues propres, mais le curage des caniveaux ne fait pas partie de leur contrat. Lui-même ne sait pas grand-chose des termes du contrat cependant, il admet que ce caniveau principal traverse la commune donc est du ressort de la mairie.
Une chose est certaine, ces personnes qui jettent les ordures dans les caniveaux ou dans les rues sont bien conscientes des effets néfastes de leur comportement sur leur environnement immédiat puisque déjà, un travail de sensibilisation avait été fait. Il convient aussi de noter que les rues de Bonoua sont entretenues régulièrement. Chaque jour des travailleuses s’attèlent au balayage de ces rues, malgré l’incivisme notoire de certaines personnes.
Marie-Claude N’da
ENCADRE
Bien que cette situation ne fasse pas de ces endroits des zones à risque en cas de fortes pluies, il convient tout de même d’attirer l’attention des uns et des autres sur l’importance de garder son environnement sain, car les lieux comme les caniveaux ou les égouts sont le point de départ de certaines maladies, notamment le choléra dont des cas ont récemment été découverts et des décès enregistrés à Port-Bouet Vridi. C’est le lieu de redoubler d’efforts et de vigilance pour éviter que cette maladie ne devienne une épidémie. Par ailleurs, la journée mondiale de l’environnement célébrée le 5 juin dernier a été l’occasion pour de nombreux experts de tirer la sonnette d’alarme sur la pollution par les déchets plastiques. Le gouvernement de Côte d’Ivoire a, en marge de cette journée, invité les populations à adopter des gestes éco-citoyens et a encouragé les bonnes pratiques.
M. C. N.