Face à l’intensification des combats et à la gravité de la situation dans l’Est de la République démocratique du Congo (RDC) sur fond d’escalade entre Kinshasa et Kigali, la communauté internationale se mobilise. Ainsi, de New-York à Nairobi en passant par Addis-Abeba, l’ONU, l’Union africaine et la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) ont mis en branle la diplomatie à l’effet de trouver une issue à cette crise qui, si l’on n’y prend garde, risque d’embraser toute la région des Grands Lacs. Déjà, entre la RDC et le Rwanda, plus rien ne va. Et pas plus tard que le 25 janvier dernier, Kinshasa annonçait la rupture officielle de ses relations diplomatiques avec Kigali qu’elle accuse à cor et à cri, de mener une guerre par procuration aux côtés du M23. Un mouvement rebelle né de ses cendres en 2021 après sa défaite en 2013, et qui mène la vie dure à l’armée congolaise dans l’Est du pays où, volant de conquête en conquête, il a atteint la ville de Goma, la capitale du Nord-Kivu dont il a annoncé la prise le 27 janvier dernier. Une étape importante qui marque un tournant dans cette guerre qui consume à grand feu le pays de Félix Tshisékédi, et qui est loin d’avoir révélé tous ses dessous.
Plusieurs représentations ont essuyé le courroux des manifestants
Toujours est-il que pour Kinshasa, le problème est moins le M23 que le Rwanda qui, du reste, a été épinglé par plusieurs rapports onusiens pour son soutien auxdits rebelles. Enfonçant le clou, Washington et Paris sont allées chacune de ses accusations contre Kigali sommée de cesser son soutien aux rebelles et de retirer son personnel militaire de la RDC. En réponse, le Rwanda qui a toujours été dans la dénégation, a fini par brandir comme argument, le droit de se défendre contre des actions de son voisin qui, selon lui, menacent sa sécurité intérieure. C’est dire la complexité de cette crise qui a atteint aujourd’hui des proportions inquiétantes avec l’exacerbation des tensions entre les deux voisins. Lesquels voisins semblent avoir largement dépassé le cap des piques et autres passes d’armes pour être dans une logique d’affrontements directs entre leurs deux armées. C’est pourquoi il faut saluer la mobilisation de la communauté internationale à l’effet de trouver une solution dans le sens de la désescalade entre les deux pays. En l’espace de trois jours, le Conseil de sécurité de l’ONU a tenu deux réunions d’urgence sur le sujet. De leur côté, l’Union africaine et l’EAC ne restent pas les bras croisés au moment où de nombreuses chancelleries occidentales appellent au dialogue. Reste à savoir si tous ces efforts et tous ces appels au dialogue seront entendus. La question est d’autant plus fondée que les ponts semblent totalement coupés entre les deux chefs d’Etat antagonistes que rien, jusque-là, n’a pu réunir autour d’une table de négociations. Pendant ce temps, le patron de l’ONU semble prêcher dans le désert en demandant le retrait des forces rwandaises de la RDC au moment où Kinshasa réclame des sanctions contre Kigali.
Il est temps d’arrêter le jeu de dupes dans cette guerre
Mais en dépit de l’avalanche des accusations et de la bronca internationale, le filiforme homme de Kigali reste droit dans ses godasses. Comment peut-il en être autrement quand tout le monde se contente de condamner sans aller plus loin en prenant des mesures coercitives ? Autant dire que dans cette crise rwando-congolaise, il y a comme une hypocrisie de la communauté internationale, qui ne dit pas son nom. Tout le monde ou presque jetant la pierre à Paul (Kagame) sans véritablement trancher dans le vif en faveur de Félix (Tshisékédi). Et la persistance de la crise est la rançon de cette hypocrisie de la communauté internationale qui a laissé pourrir la situation pour se mettre à courir maintenant dans tous les sens. C’est, du reste, dans ce contexte que l’on apprend qu’une manifestation en opposition au conflit dans le Nord-Kivu, a ciblé des ambassades à Kinshasa où plusieurs représentations diplomatiques dont celles du Rwanda, de l’Ouganda, de la Belgique, de la France et des Etats-Unis, ont essuyé le courroux des manifestants. Une situation rapidement maîtrisée par les forces de l’ordre, mais qui traduit l’exaspération des populations fatiguées de la guerre et décidées à dénoncer le laxisme de la communauté internationale. C’est dire s’il est temps d’arrêter le jeu de dupes dans cette guerre qui est loin de livrer tous ses dessous, et où se jouent des intérêts cachés dans une RDC qui n’est pas loin d’être victime de ses immenses richesses.
« Le Pays »