Jusqu'alors réservé à la femme, le métier de sage-femme est désormais ouvert aux hommes, à travers le concours d’entrée à l'Institut national de formation des agents de santé (Infas). Les hommes qui assurent cette fonction sont appelés les « maïeuticiens ».
Dr Gnou Tano, directeur coordonnateur du Programme national de la santé de la mère et de l’enfant (Pnsme), explique clairement que si les pouvoirs publics ont pris cette initiative, c’est parce que le comportement des sages-femmes est très décrié par le public, et singulièrement par les femmes qui viennent accoucher. « Aujourd’hui, avec l’arrivée des maïeuticiens, on verra comment les sages-femmes vont se comporter avec leurs patientes. En tout cas, le ministère de la Santé ne tolérera aucun manquement, venant d’elles », prévient-t-il.
Quel est le regard des sages-femmes sur ces hommes qui exercent désormais le même métier qu’elles ? « C’est bien. Si cela peut apporter un plus à la natalité, c’est tant mieux », estime Abiba Koné. Pour Yolande Kouadio, il n’y a rien de nouveau. Puisqu’elles font déjà des accouchements avec des gynécologues et des chirurgiens à leurs côtés. « Nous n’avons aucun problème avec l’introduction de cette profession », confie Estelle Beugré.
« Les sages femmes sont très méchantes ! »
Les femmes saluent l’arrivée des maïeuticiens. « C’est une bonne initiative. Car les sages- femmes sont très méchantes. Une fois, elles m’ont laissée seule dans la salle d’accouchement. Je les entendais bavarder dans un bureau. Lorsqu’elles ont été interpellées par leur major, sur dénonciation de mon mari, elles ont fait semblant d’être occupées, avant de revenir dans la salle », raconte Nicole Yodé. Mme Sanou est heureuse de savoir qu’il y aura désormais des hommes, qui les feront accoucher dans les hôpitaux. « Je les préfère aux femmes. Ils sont plus patients et attentionnés que les sages-femmes », affirme-t-elle. C’est tout simplement une joie pour Mlle Prisca Bony, d’apprendre qu’il existe désormais des hommes pour faire accoucher les parturientes, au même titre que les sages-femmes désormais. C’est qu’elle est persuadée qu’avec les maïeuticiens, elles seront mieux traitées à l’accouchement.
Réserves
Des hommes se sont également prononcés sur ce métier. « C’est gauche que des hommes fassent accoucher les femmes. Cette tache doit être exclusivement réservée aux femmes », soutient M. Lassina Traoré. Un avis que ne partage du tout Marcelin Angoua. Pour lui, l’essentiel c’est d’aider à donner la vie. « Il n’y a donc aucun problème que les hommes contribuent à cela », dit-il. Oumar Barro, estime-lui, qu’il est temps de briser les barrières, en laissant chacun aller vers la profession de son choix.
Comment ces maïeuticiens sont- ils perçus, lorsqu’ils sont à la tâche, aux côtés de leurs collègues ? « Les sages-femmes portent un regard positif sur notre profession. La collaboration se déroule bien. Nos collègues hommes nous admirent et nous encouragent aussi », confie Francis Késsé, étudiant de la 2e promotion 2020-2023, des maïeuticiens en stage à l’Hôpital général de Yopougon- Attié. Issu de la 4e promotion 2022-2025, Ephraïm Séry est présentement en stage à la Protection maternelle infantile (Pmi) d’Attécoubé. « Tout se passe bien avec les sages- femmes et les parturientes », rassure-t-il.
Si Ephraïm n’a pas encore connu de difficultés dans l’exercice de sa profession, ce n’est pas le cas pour Francis. « L’an passé, lors de mon stage à l’Hôpital général de Maféré, une femme enceinte a refusé que je la touche, parce qu’elle était surprise de me voir dans la salle d’accouchement ». Faisant partie des 50 maïeuticiens de la première promotion 2019-2022, baptisée en mai dernier, Sigata Soro indique : « en attendant notre affectation, nous sommes actuellement en stage de perfectionnement d’un an dans les hôpitaux d’Abidjan et de l’intérieur du pays. Moi, je suis pour l’instant au Centre de santé urbain (Csu) d’Anono à Cocody. Et ici tout va bien ».
Boubakar Barry