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Politique

Décryptage : L’awélé démocratique

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Les évènements du 26 mars 1991 (photo archives)

Conakry, Bamako, N’Djamena, Ouagadougou, etc., on pourrait en citer d’autres encore. Toutes ces villes, théâtre des révolutions de palais, peinent à renaitre des décombres des régimes défunts. Les liesses populaires, parfois éparses, parfois fusionnelles, n’ont pas encore suffi pour proportionner la gouvernance aux enjeux sociaux, économiques, politiques et sécuritaires.

Un sale temps pour les démocraties

Nul doute que les secousses politiques et sécuritaires ne peuvent pas être seulement des épreuves historiques pour nos Etats. Comme si cela ne suffisait pas, elles se transforment en désastre. Artistes célèbres, économistes réputés, journalistes éminents, politologues estimés, sociologues engagés, et bien entendu hommes et femmes sensibles, tous œuvrent pour exorciser ces convulsions. La preuve indéniable d’un combat acharné contre les zélateurs de la pensée unique et les fantassins du narco terrorisme. Un sale temps pour les démocraties. Pourtant, des villes entières s’enorgueillissent d’être capitales du livre (Conakry), de la photographie (Bamako) ou du cinéma (Ouagadougou). Mais, ces mêmes villes, aujourd’hui, sont perçues comme des simples acteurs de seconde zone.

Dans ces villes, les citoyens fulminent de vivre emberlificotés par l’insécurité et l’instabilité politique. Conséquence : les citoyens accordent peu de crédit à leurs élites. Leurs intérêts ne convergent pas, faute de connecteurs logiques entre les besoins des citoyens (justice sociale) et les résultats de la gouvernance. Ne faites pas la grimace. Nos pays sont traumatisés et divisés. Jadis objet de fierté, ils sont aujourd’hui sujets de pitié et d’incompréhension. Par là, quelques discours pour faire un dernier baroud d’honneur. Par-ci, quelques gestes pour enfouir nos problèmes dans les bas-fonds des capitales. En permanence, l’insécurité et l’instabilité nous prennent de vitesse. Or, nous devons être capables d’y anticiper.

Entre deuil et errance

Partout, le deuil et l’errance caractérisent le quotidien des populations. Partout, émergent des projets de société idéologiquement séduisants, mais pragmatiquement irréalistes. Hélas ! Le 20 octobre 2022 à N’Djamena, la manifestation de l’opposition contre la prolongation de la transition à deux ans, tourne au fiasco : plus d’une cinquantaine de morts. La communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (CEEAC) s’indigne. Toujours le 20 octobre 2022, mais cette fois-ci en Guinée Conakry, la protestation du Front national pour la Défense de la Constitution (FNDC) pour un retour rapide des civils au pouvoir tourne court : cinq morts, et plus d’une vingtaine de blessés. Le 24 octobre 2022, sur la base militaire de Djibo (Burkina-Faso), plus d’une dizaine de soldats meurent dans une attaque narcoterroriste. Le putsch du 30 septembre 2022 du capitaine Ibrahim Traoré (34 ans) contre le colonel putschiste Paul-Henri Sandaogo Damiba n’a pas encore fait de l’effet. Le 22 septembre 2022, à Banibangou (Niger), plus d’une dizaine de civils meurent dans une attaque narcoterroriste. Depuis mars 2022 (Mali), pour s’assurer le contrôle du territoire, des combats meurtriers entre l’EIGS et le JNIM jettent les civils sur les routes de l’exil. De part et d’autre de Gao, non loin du camp militaire de la ville, poussent les tentes des déplacés. La liste peut être longue.

Moteurs à explosion sociale

Au Nord comme au Centre du Mali, le sort s’acharne sur les populations, qui sont isolées. La route Gao-Niamey est devenue celle de tous les dangers. Les populations de la région ne dorment plus que d’un seul œil. Comme me raconte un ami, « nous dormons avec le risque de ne jamais se réveiller. J’ai l’impression que l’on ne nous considère pas ». Dans La Terre a soif, E. Orsenna dit ceci : « Et comme les jacinthes tuant le fleuve à petit feu », les narcoterroristes, « (…) interdisent l’agriculture, bloquent le commerce, ferment les écoles, condamnent la musique, réasservissent les femmes… Malgré les campagnes pour les éradiquer, ils progressent tout le long du fleuve » Niger. Les narcoterroristes, c’est donc ce grain de sable qui grippe la machine de la gouvernance. La suite : nos Etats sont devenus des moteurs à explosion sociale. Oh marchands d’espoir, ne nous laissons pas monter au nez les vapeurs d’essence des Sotrama! Ne nous vautrons pas dans l’indifférence. Ne fermons pas les yeux sur le drame qui se joue en face de nous. Au-delà des capitales, agissons contre l’horreur !

Marcher sur des œufs dans son propre poulailler

Nous le savons tous, en Afrique de l’Ouest, nous doutons de nos exécutifs, de nos démocraties comme nulle part ailleurs sur le continent. Nous avons le sentiment d’une fin inexorable de nos sociétés, faites d’abus, de domination, d’humiliation et de violence. Au point que nos dirigeants sont obligés de marcher sur des œufs dans leur propre poulailler. Conséquence : les crises s’emboitent. La rivalité des Etats s’accélère. Les logiques de compétition-confrontation Est-Ouest et les tensions des modèles politiques – démocratie-autocratie – bloquent toute initiative de paix. Face à ces enjeux de paix, partout la quête de sens dans la gouvernance est prégnante. À nous tous, s’impose la nécessité d’agir et d’avancer ensemble. Par exemple, au Mali, l’actuel avant-projet constitutionnel pourrait être un terreau favorable à l’unité. À condition, bien sûr, que des débats démocratiques aient lieu. C’est le prix à payer pour que la future constitution soit la graine incontournable de notre awalé démocratique. Car la gouvernance ne consiste pas seulement à respecter une règle, à appliquer des lois, mais à affronter des situations nouvelles hors normes grâce à des politiques profondément enracinées. De ce point de vue, la gouvernance ne fonctionne que lorsqu’elle est partagée clairement par l’ensemble des citoyens.

Désolé, si mes écrits vous peinent, car ils pourraient rendre furibard. Pourtant, je ne souhaite être ni donneur de leçons, ni rêveur. Mais, par ces écrits, je tente de célébrer l’amour que chacun d’entre nous porte pour le Mali, les Maliens et l’humanité. Donc, ne faites pas de tir de barrage. Nos méthodes, nos discours et nos actes doivent être des générateurs d’unité et d’amitié, collés à nos quotidiens. Donc, insurgeons-nous contre le conformisme, qui conduit à l’échec. Retrouvons le chemin d’équilibre. Faisons preuve de compassion à l’égard de nos compatriotes dans le Liptako gourma, au Centre du Mali et dans le reste de l’Afrique. Au-delà des superficialités, levons-nous, et battons-nous contre l’inexcusable : la bêtise humaine.

Mohamed Amara

Sociologue




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