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Politique

Lutte contre le terrorisme : la situation sécuritaire se dégrade malgré les assurances des autorités

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Les bruits de bottes sourdent du sable chaud du Sahara septentrional malien, sur fond de déplacements massifs de populations déferlant dans les refuges provisoires des villes du nord, elles-mêmes au bord de la congestion et progressivement mises sous embargo terroriste. À Bamako, le gouvernement rassure pourtant et assure à la tribune des Nations Unies être à l’origine d’« avancées très significatives sur le terrain en termes de sécurisation des personnes et de leurs biens » !

Le contraste était saisissant, ce lundi 3 octobre, dans les locaux de la Direction des informations et des relations publiques des Armées (DIRPA) : le colonel Souleymane Dembélé est catégorique : « … On parle de l’EIGS, mais jusqu’à preuve du contraire les FAMa ne voient pas l’EIGS sur le terrain ».

En clair, pour le patron de la communication des Forces armées maliennes, la « supposée » menace que ferait peser l’Etat islamique au Grand Sahara sur Ménaka et autres régions du Nord relève d’une vulgaire « campagne mensongère des médias occidentaux contre les FAMa». Rien moins !

Fanfaronnade ou conviction réelle fondée sur la réalité du terrain, est-on fondé à s’interroger. Les plus lucides concluent assez vite au premier terme, tant les propos voulus rassurants du colonel Dembélé ne parviennent guère à s’émanciper, au choix du registre de la palinodie, de la politique de l’autruche ou de la cécité volontaire…

De toute évidence, le bellicisme radical de plus en plus extrémiste des militaires au pouvoir au Mali, a des effets soporifiques sur une population dont il fait convenir du soutien encore réel d’une importante frange. Cette posture de déni des faits fait l’économie de l’impératif de réponse à ce qui apparaît de plus en plus comme une déroute de l’Etat face aux hordes djihadistes.

Et pour cause : contrairement aux assurances du pouvoir militaire malien, la situation dans le septentrion malien offre un tableau sombre d’une progression continue de l’emprise terroriste qui rappelle les heures les plus tristes de l’occupation djihadiste en 2012 jusqu’à l’intervention militaire française, du 9 au 17 janvier 2012 à Konna ! Les civils désertent aujourd’hui la région de Ménaka pour tenter d’échapper à l’avancée de l’EIGS.

L’appel émouvant du général El Hadj Gamou

En effet, au nord du Mali, les différents camps fourbissent leurs armes, pour une confrontation, entre tendances rivales de la galaxie djihadiste, qui s’annonce décisive pour le contrôle de ce qui constitue les deux tiers du territoire national.

Le paradoxe est l’absence remarquée de l’Etat malien, à travers les forces armées et de sécurité, dans les confrontations en cours ou en perspectives, tant pour assurer la sécurité des populations qu’en matière d’offres d’asile et de secours. Ce qui apparaît sous-jacent dans l’appel dramatique du général El Hadj Gamou, visiblement éprouvé par la solitude d’une longue fidélité à l’Etat central malien jamais prise à défaut.

En effet, le général Gamou, général de l’armée malienne à la tête du pro-gouvernemental Groupe d’autodéfense touareg Imghad et alliés (GATIA), avait appelé les habitants des différentes localités autour de Gao et Ménaka, à refluer pour se réfugier dans les villes du nord, disposant encore de garnisons.

Le général Gamou, connu pour sa grande probité, expliquait son appel par le fait qu’il n’y avait « pas de forces armées ni aucune entité pour garantir la sécurité des populations dans ces zones » exposées à l’inexorable avancée de l’EIGS. Gamou, pour qui « Le mal arrive inévitablement », était convaincu que « les ennemis (Ndr : les groupes terroristes !) prendront sûrement le contrôle de ces régions car aucune (force de) sécurité n’est là pour les en empêcher ».

Et les faits chaque jour continuent de lui donner raison, dans une absence de l’Etat central malien face aux tragédies des populations livrées aux exactions des terroristes. D’ailleurs, selon Moussa Ag Acharatoumane, Secrétaire général du MSA, la ville de Ménaka demeure la seule localité qui n’est pas encore sous contrôle de l’EIGS.

D’où l’union de forces opposées et que seule explique la menace d’un ennemi commun. Ainsi, sur le plan de la riposte, on assiste depuis quelque temps à une alliance objective entre les groupes armés signataires ou non, mais le plus souvent alliés au camp du ‘’terrorisme national’’, représenté par le JNIM, le Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM, affilié à Al-Qaïda), dirigé par Iyad Ag Ghali qui bénéfice des renforts des combattants de la Katiba Macina de son allié Amadou Kouffa.

Ainsi, lors des affrontements de Talataye, le 6 septembre dernier, qui avaient vu la victoire de l’EIGS, on sait que le Mouvement arabe de l’Azawad, MSA, avait activement combattu aux côtés des troupes du JNIM, avant d’abandonner la ville aux mains des internationalistes de l’EIGS.

Les mêmes alliances sont en cours de reproduction, cette fois avec le renfort très remarqué de la Coordination des mouvements de l’Azawad, la CMA, essentiellement le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (issu de Ansçar Eddine de Iyad Ag Ghali, devenu JNIM) et les irrédentistes du Mouvement national de libération de l’Azawad- MNLA.

Ainsi, M’Bareck Ag Ackli, chef d’état-major de la CMA, a signé ce 8 octobre un ordre de mission 0011/2022/EMGA/BE/CMA, autorisant l’envoi à Ménaka de 100 pick-up, lourdement armés en hommes, armements et équipements de communication adéquats, jusqu’à la fin de la mission, dont la durée n’est pas précisée dans l’ordre de mission. Ces dispositions, aux allures de préparatifs militaires de grande envergure, préfigurent la confrontation en perspective autour de Ménaka et, in fine, avec Gao dans la ligne de mire.

Des milliers de déplacés

De toute évidence, le Nord du Mali, même s’il n’est pas encore sous emprise totale djihadiste, n’en ploie pas moins déjà sous le joug terroriste, avec des centaines, et déjà des milliers de déplacés qui se sont regroupés aux abords de Gao, la dernière ville-digue du Mali.

Le mode opératoire est identique à ce qui s’est passé le 7 octobre 2022 dernier quand, selon des ressortissants de la localité, des hommes armés ont emporté tous les animaux du village de Nonia, situé non loin de Bara, dans la commune éponyme à environ 70 km de Gao-ville, cercle d’Ansongo.

Peu avant cette razzia, les mêmes sources rapportent que des hommes armés avaient déjà emporté les bœufs de Bara ville aussi. Bara est à 75 km de Gao-ville et 24 km d’Ansongo ville. Les éleveurs de ces zones pastorales sont soumis au racket des groupes terroristes qui exigent 2.700 FCFA par animal en contrepartie de liberté de transhumance et de pâturage. À ce racket, destiné à l’entretien des troupes, les djihadistes procèdent au dépeuplement actif de plusieurs zones, dans une stratégie de la terre brûlée.

Là est le nœud du problème malien : un pouvoir en place, peu actif dans les zones de confrontations effectives pour démontrer la reprise en main annoncée aux populations, soutenu par des partenaires russes, dont l’inefficacité est manifeste face à la situation de progression djihadiste.

Les instructeurs russes présentés comme la solution aux problèmes sécuritaires maliens semblent au contraire participer à leur aggravation. Le bilan qui nous est aujourd’hui proposé tend plus vers le « gagnant-perdant » ; le perdant étant tout désigné : le Mali et son peuple.

Nous avions déjà souligné que la montée en puissance des FAMa, soutenues par leurs partenaires russes, restait curieusement proportionnelle à l’aggravation de l’insécurité et la propagation des violences sanglantes exercées sur les populations victimes, prises entre deux feux.

Un observateur, indigné par la situation, s’insurge : « Qu’on ne puisse se rendre à l’évidence de soi-même peut se comprendre mais qu’on veuille refuser de voir soi-même la vérité pourtant claire est un aveuglement suicidaire », lance-t-il, en guise d’avertissement.

Puisque le Premier ministre de la transition aime à citer des auteurs français, en voici un autre dont il pourrait méditer la sentence ; Charles Péguy : « Il faut toujours dire ce que l’on voit, surtout il faut toujours voir ce que l’on voit. »

Guédjouma Konaté




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