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Politique

Démocratie, dictature et développement

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Récemment en France, le président béninois Patrice Talon avait expliqué aux patrons français qu’ils pouvaient venir investir dans son pays parce qu’il y avait réduit la liberté syndicale à l’extrême, si bien qu’il n’y avait presque plus de grève. Et il a ajouté que la démocratie dans son pays n’avait rien à voir avec celle de la France. En gros, il avait aussi restreint la démocratie dans son pays. Le débat que ces propos soulèvent est de savoir si l’Afrique a vraiment besoin de passer par la démocratie pour se développer, si une dose d’autoritarisme n’est pas nécessaire. En gros encore une fois, la démocratie ne serait-elle pas pour le moment un luxe que les pays africains ne sauraient s’offrir ?

L’ancien président français Jacques Chirac l’avait dit en son temps et cela lui avait valu une volée de bois verts. Cette fois-ci ces propos sont tenus par un chef d’Etat africain. Que devons-nous en penser ? Personnellement je ne peux que faire des constats. Le premier est que les quelques rares pays qui s’en sortent sur notre continent sont des démocraties, tandis que les vraies dictatures sont au fond du trou malgré parfois de grandes richesses dont la nature les a dotées. Je ne citerai personne, vu notre grande susceptibilité. Je constate aussi qu’en Asie, nous avons les deux phénomènes. Nous avons des pays qui pratiquent la démocratie à l’occidentale, telles que le Japon ou la Corée du sud, qui s’en sortent très bien, ou plutôt bien comme l’Inde, et d’autres, tels que la Chine, la Malaisie, l’Indonésie ou Singapour qui pratiquent leurs propres démocraties plus ou moins éloignées de celle des Occidentaux et qui s’en sortent aussi très bien ou plutôt bien. L’autre constat est que l’Europe qui s’est érigée en modèle universel de démocratie est passée par des régimes dictatoriaux parfois féroces avant de s’industrialiser et de s’ouvrir à la démocratie. Une démocratie qui est d’ailleurs toujours sous la menace de ses extrémistes. Les Etats Unis qui se sont auto-proclamés « épicentre de la vertu » se sont construits sur le massacre des populations autochtones du continent américain et sur l’esclavage des Africains. Le Japon et la Corée du sud sont aussi passés par des régimes de dictatures avant de s’ouvrir à la démocratie. Au Japon l’empereur était tout simplement un dieu. Je remarque aussi que la Côte d’Ivoire qui, pendant longtemps fut le modèle de réussite dans la région ouest-africaine au temps de notre premier président Houphouët-Boigny, le pays qui attirait tous les autres, était tout sauf une démocratie à l’occidentale. Pendant trente ans nous vécûmes sous le régime du parti unique, et ce n’était pas de la rigolade. Les grèves vous conduisaient tout droit dans des camps militaires. Les enseignants de cette époque en savent quelque chose. De même que les journalistes dont la plume fourchait si l’on peut dire. Aujourd’hui nous pleurons tous Houphouët-Boigny, mais lorsqu’il était au pouvoir, il ne fallait surtout pas le contrarier. Vraiment pas.

Alors ? Alors on ne peut tirer aucune conclusion. Je dirais que l’idéal est d’aller au développement sans passer par des régimes autoritaires, que la démocratie n’est pas présente dans l’ADN de certains peuples et absente chez d’autres, que l’on devient démocrate en pratiquant la démocratie, comme l’on apprend à marcher en marchant, et surtout, qu’il faut des démocrates pour construire une démocratie.

Je crois que l’une de nos erreurs, et ce en quoi je ne donne pas totalement tort au président béninois, est que nous avons un peu abusé de la démocratie, ce qui a fait régresser nos pays sur le plan économique. Nous avons dans bien des cas confondu la démocratie et le désordre. Nous avons laissé beaucoup de désordre s’installer dans nos pays au nom de la démocratie, et le coût s’est avéré trop élevé pour nos économies. Un peu d’autoritarisme pour remettre les choses à l’endroit ne fait pas de mal. Et il suffit d’aller au Bénin pour voir le pays en train de changer. Et ils sont nombreux les Béninois qui félicitent le président Talon pour le travail qu’il fait. Dans des pays tels que le Japon et la Corée du sud que nous envions, le droit de grève a été très restreint, au point de la rendre pratiquement inexistante, et c’est à ce prix que ces pays sont devenus ce qu’ils sont. Dans ces pays, prendre un mois entier de vacances est très mal vu. Nous aussi devrions apprendre à travailler beaucoup plus que les autres si nous voulons nous approcher d’eux. A quoi riment par exemple tous ces jours fériés que nous nous sommes octroyés ? Nous nous disons pays laïc, mais c’est nous qui avons décidé de ne pas travailler les jours de fêtes des deux principales religions que sont le christianisme et l’islam. Pourquoi ne devrions-nous pas travailler parce que c’est l’anniversaire de la montée au ciel de Jésus ou de sa mère, ou l’anniversaire du jour où Abraham a sacrifié un mouton à son Dieu, ou parce que les musulmans arrêtent leur jeûne ? En plus il nous faut attendre le soir à 20 heures pour savoir si on travaille le lendemain ou non. C’est tout cela que nous devrions réajuster si nous voulons avancer.

Venance Konan




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