Cela fait aujourd’hui, plus d’une décennie que la Côte d’Ivoire est régulièrement en proie aux effets néfastes des intempéries, avec pour point culminant la ville d’Abidjan. Laquelle enregistre à chacune des saisons pluvieuses, un nombre effarant de morts, de blessés et de dégâts matériels. Et à chacune de ce qu’on pourrait appeler, les éditions de ce déplorable évènement saisonnier, les pouvoirs publics n’ont d’yeux que pour le déguerpissement des potentielles victimes, vivant dans les zones dites à risques. Autrement dit, susceptibles de pâtir sous l’effet des glissements de terrain et autres torrents de boue. Qui déferlent sous l’effet du ruissellement continue d’importantes quantités d’eaux de pluies. Voilà un phénomène qui, il y a plusieurs années en arrière était assez méconnu des Ivoiriens et singulièrement des abidjanais. Tout simplement parce que les débordements des eaux de ruissellement, n’étaient pas aussi quantitativement importants et ce faisant dangereux. Au point d’imposer comme unique échappatoire à leurs désastreuses conséquences, l’abandon des sites endommagés. C’est bien là, une réalité que nombre d’habitants de ces zones à risques, ont du mal à croire ou à comprendre tout simplement. Eux qui ont vu des générations entières vivre des années durant en ces lieux, sans subir des affres d’une quelconque montée des eaux. Laquelle s’y est pourtant produite de nombreuses fois, avec des volumes d’eau non négligeables, surtout que la pluviométrie était à l’époque plus abondante qu’elle ne l’est aujourd’hui.
Ceci explique entre autres raisons, la propension de nombre de ces habitants, à toujours trainer les pieds quand, le déguerpissement leur est signifié, comme seule alternative pour les mettre à l’abri des sinistres. Ignorant par ce fait même que les temps ont changé. Que les mêmes phénomènes qu’ils ont jadis vécus là, sur ces mêmes sites, bien que semblables à ceux qui se produisent aujourd’hui, restent tout de même à bien des égards, différents de ces derniers. Par ce qu’ils sont plus réguliers d’années en années, plus intenses que par le passé et surviennent avec plus de forces. Tout simplement par ce que leurs manifestations, contrairement au passé, ne relèvent plus de facteurs météorologiques d’origine strictement naturelle. Donc obéissant à la seule évolution normale du temps. Ces phénomènes sont dans leurs manifestations saisonnières désormais amplifiés, accélérés et surtout régulés par le dérèglement du climat. Une différence qui, bien que notable, n’est malheureusement pas toujours bien perçue par les populations. Faute d’une mémoire climatique bien exercée à cet effet.
C’est bien là, une réalité moult fois relevée par les environnementalistes et climatologues ivoiriens. Et qui impose aux pouvoirs publics de revoir leurs stratégies de prévention et de protection des populations contre les intempéries. En mettant surtout en relief, la véracité du changement climatique et en œuvrant afin que, d’une manière plus générale, ces populations se l’approprient véritablement. Avec en prime, les plus défavorisées et névralgiques d’entre elles. Celles qui sont toujours contraintes par la pauvreté, à aller vivre dans ces zones à risques. L’effet escompté d’une telle appropriation, étant celui de les voir en contrepartie, s’impliquer pleinement et ardemment, dans la vulgarisation et surtout dans l’adoption des attitudes, comportements et actions d’adaptation aux conséquences du changement climatique, qui leurs auront été enseignés et surtout recommandés. Il en résultera à coup sûr, un abandon volontaire de ces sites se transformant en mouroirs au fil des saisons pluvieuses, ou tout le moins, une réduction notable et continue du nombre des personnes vivant dans ces zones à risques, de même que la cessation de formation de nouvelles agglomérations sur des sites du même genre. L’argument, au demeurant vrai de la pauvreté, régulièrement brandit ici et là, pour justifier ou expliquer la prolifération de ces endroits non constructibles, mais habités, pourrait alors perdre toute légitimité et intérêt. Aussi bien pour les habitants de ces zones à risques qui l’avancent chaque année se défendre contre les déguerpissements, que pour les auteurs des opinions publiques qui les soutiennent et les encouragent ainsi à s’exposer à la mort.
L’on a remarqué tous les ans que, tout intérêt et engagement des pouvoirs publics, à résoudre au mieux cette problématique, disparait dès que passe la saison pluvieuse. Un relâchement malséant, offrant comme l’on semble ne pas s’en rendre compte non plus, l’opportunité d’exister à de nouveaux sites mal famés. Ainsi que le grossissement du nombre d’habitants, sur ceux qui existent déjà. Autant dire que l’interdiction faite aux populations d’habiter les zones à risques, doit être à tout point de vue, une action plutôt permanente et fermement menée.
Moussa Ben Touré