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Politique

Gambie : Barrow trainera-t-il vraiment Jammeh devant les barreaux ?

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Rien que l’évocation de son nom suffisait pour susciter la frayeur au sein des populations gambiennes en général et au sein des opposants en particulier, tant il a régné en véritable despote sur le pays, et cela pendant 22 ans. Si c’était un quizz, personne ne mettrait plus d’une seconde, pour savoir qu’il s’agit de Yahya Jammeh. Ce dernier a tellement fait de mal aux Gambiennes et aux Gambiens, que beaucoup d’entre eux avaient fondé l’espoir que sa chute, en 2017, donnerait l’occasion à la Justice de l’entendre sur l’ensemble de ses basses œuvres. Adama Barrow, son successeur, à l’entame de son mandat, était, peut-on dire, dans cette logique. Ainsi, une Commission « vérité et réconciliation » avait été mise en place, à l’effet d’enquêter sur cette période de braise de l’histoire de la Gambie. Le rapport qui a sanctionné ses investigations, fait froid dans le dos : exécutions extrajudiciaires, viols, tortures, disparitions forcées et nombreuses autres violations graves des droits de l’Homme, entre 240 et 250 personnes mortes entre les mains de l’Etat et de ses agents. La commission ne s’est pas contentée d’enquêter sur les crimes commis sous l’ère de l’autocrate. Elle a aussi formulé des recommandations. L’une d’elles préconise des poursuites judiciaires contre l’ancien dictateur et ses complices. Le rapport a été remis au gouvernement, en novembre 2021. Plus de 5 mois après, l’Exécutif gambien s’est dit disposé à faire juger l’ancien despote. L’annonce a été faite le 25 mai dernier par Daouda Jallow, ministre gambien de la Justice. Ce dernier a apporté la précision qu’une Cour spéciale établie en Gambie, jugera l’ancien président et ses complices. Mais la grande question que l’on peut se poser, est de savoir si Barrow va trainer vraiment Jammeh devant les barreaux.

Yahya Jammeh lui-même a intérêt à travailler à faire face à la Justice de son pays

A cette interrogation, l’on peut apporter les éléments de réponse suivants. Dans l’euphorie de sa victoire sur le tyran et pour donner l’impression qu’il fera dans la rupture par rapport à la gouvernance de son sulfureux prédécesseur, Adama Barrow avait laissé entrevoir des poursuites contre ce dernier pour l’ensemble de ses basses besognes. Cette promesse de faire rendre gorge à l’ancien dictateur, a vite été rangée dans les oubliettes à cause de considérations politiciennes. En effet, Adama Barrow, pour se faire réélire, ne s’est pas bouché le nez pour pactiser avec le parti de l’ancien despote. Ce pacte, grâce auquel il a laminé ses rivaux à la dernière présidentielle, a connu vraisemblablement une contrepartie : celle de ne pas perturber l’exil doré et tranquille de celui qui a contribué à le faire roi à la présidentielle, c’est-à-dire Yahya Jammeh. Un autre élément de réponse à la question de savoir si Barrow va vraiment traîner Jammeh devant les barreaux, est en lien avec le timing choisi par le gouvernement pour montrer sa disposition à faire juger l’ancien président. En effet, Adama Barrow a épuisé son premier mandat sans pour autant afficher cette volonté de façon ferme. C’est finalement, pendant son second et en principe dernier mandat qu’il montre cette disposition. Et cela n’est pas innocent. En tout cas, Adama Barrow voudrait refiler la patate chaude à son successeur, qu’il ne se prendrait pas autrement. Outre cela, Adama Barrow, en mettant en veilleuse sa volonté de poursuite contre Jammeh, a évité ainsi de s’aliéner le soutien des partisans de son prédécesseur. En réalité, on peut être tenté de dire que par là, Barrow gagne en termes de stabilité de son régime, d’avoir Yahya Jammeh à l’extérieur du pays plutôt qu’à l’intérieur. Mais le plus grand obstacle à un jugement de Jammeh en Gambie, est lié au fait que la Gambie et la Guinée équatoriale, pays d’exil de l’ancien président, ne sont pas liés par des accords d’extradition. Et le dirigeant gambien le sait. D’ailleurs, on peut affirmer que le choix de la Guinée équatoriale par Jammeh, n’a pas été un fait du hasard. En effet, un dictateur n’en extrade jamais un autre. Ça aussi, ceux qui ont négocié la sortie de l’ancien dictateur vers le pays de Teodoro Obiang NGuema, le savaient. En rappel, c’est Alpha Condé qui avait arrangé cela quand il était à la tête de la Guinée. De ce qui précède, on peut craindre que les nombreuses victimes aient encore à attendre longtemps pour voir Jammeh et ses « Junglers » répondre de leurs crimes devant les tribunaux gambiens. C’est simplement, peut-on avoir l’impression, par acquit de conscience qu’Adama Barrow a laissé entrevoir cette possibilité. Mais l’ancien dictateur doit se rendre à l’évidence que son tuteur et protecteur équato-guinéen, n’est pas éternel. Rien ne garantit qu’après lui, « le colis » qu’il est, ne sera pas envoyé à Banjul. C’est pourquoi Yahya Jammeh lui-même a intérêt hic et nunc à travailler à faire face à la Justice de son pays. Adama Barrow doit aussi véritablement s’investir pour cela. Car, c’est à ce prix qu’ils aideront la Gambie à se réconcilier avec elle-même, après 22 ans de traumatisme.

Pousdem PICKOU




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