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Politique

Une histoire, des lectures

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Une histoire peut se lire de la manière que l’on veut. Ou de plusieurs manières. Tout dépend de chacun. Prenons l’histoire récente du Mali. On pourrait la lire ainsi : il était une fois un brave pays avec de braves soldats qui se battaient bravement contre de vilains djihadistes que la vilaine France avait déposés sur son sol. Les braves et incorruptibles soldats maliens étaient sur le point de remporter la bataille lorsque la France, toujours elle, s’invita dans la partie. Elle fit semblant de chasser les vilains djihadistes qu’elle entrainait en réalité, et leur donna les moyens de se déployer dans tout le pays, pendant qu’elle en pillait toutes les ressources, en ne laissant rien où la main ne passe et repasse. Les braves soldats maliens, qui avaient commis l’erreur de laisser le fauteuil présidentiel à un civil, revinrent au pouvoir, et décidèrent de chasser la vilaine France et de s’allier avec de braves mercenaires russes qui n’avaient peur de rien. Et en deux temps trois mouvements et deux gorgées de Vodka, les mercenaires russes mirent en déroute les vilains djihadistes. Et la France qui, la queue entre les jambes, avait dû se replier sur le pays voisin traitre du Niger, n’eut plus que ses yeux pour pleurer. Et les panafricanistes, avec à leur tête un camérouno-ivoiro-français purent aller saluer le nouvel héros de la nouvelle Afrique, en l’occurrence, le colonel Assimi Goïta, chef de la junte malienne.

Plus sérieusement, j’ai entendu madame Aminata Traoré, ancienne ministre malienne, grande figure de l’alter-mondialisme affirmer que l’histoire de la colonne de djihadistes qui fonçaient sur Bamako était une invention, que le président par intérim Diacounda Traoré n’avait jamais demandé à la France d’intervenir dans son pays, que c’est la France qui entraîne les djihadistes, et que l’objectif caché derrière tout cela est de diviser le Mali. Le Premier ministre malien Choguel Maïga a déclaré lui aussi pour sa part que l’objectif de la France et des Européens était de diviser le Mali, raison pour laquelle ils avaient interdit aux soldats maliens d’entrer à Kidal, et que le nom Takouba veut dire « sabre » en Tamachek, c’est-à-dire le sabre qui doit couper le Mali en deux. En gros la France aurait entraîné les autres pays européens, y compris le Canada dans cette aventure pour détruire le Mali.

L’autre façon de raconter la même histoire est celle-ci : des indépendantistes Touareg venus de Lybie et associés à des djihadistes avaient repoussé les soldats maliens au nord du pays. Ces derniers, plutôt que de se battre contre les assaillants, avaient choisi de renverser le président Amadou Toumani Touré, qui était à la fin de son mandat et n’envisageait pas de se représenter, pour jouir des délices du pouvoir. Devant leur incapacité à arrêter les djihadistes qui fonçaient sur Bamako, les Etats de la CEDEAO ayant été eux aussi incapables de lever une armée pour faire face à cette menace, la France dut intervenir pour repousser les djihadistes. François Hollande qui dirigeait alors la France vint au Mali où il fut accueilli comme un héros. Mais les djihadistes changèrent de stratégie et, plutôt que d’attaquer en colonnes visibles de loin, il se dispersèrent dans tout le pays, en se déplaçant désormais à moto en semant la terreur partout. Ils purent ainsi gangréner tout le Mali, et même les pays voisins tels que le Niger, le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire. Les militaires maliens renversèrent le régime du président Ibrahim Boubacar Kéïta dit IBK, s’allièrent à prix d’or à la firme de mercenaires russe Wagner afin d’assurer leur protection, et décidèrent de s’incruster au pouvoir pour au moins cinq ans. La CEDEAO refusa de s’inscrire dans un tel scénario et imposa des sanctions au Mali afin que la junte propose un calendrier plus réaliste. Tous ceux qui dans l’intelligentsia africaine affirmaient ne pas aimer la France tout en vivant librement en France accusèrent ce pays d’être celui qui a manipulé toute la CEDEAO.

La France et les autres pays européens viennent d’annoncer leur départ du Mali. Au même moment, pays africains et pays européens sont en train de redéfinir leur nouveau partenariat. Vous avez dit nouveau ? Rêvons un peu. Rêvons aussi que le Mali, débarrassé de la France et de ses alliés, réussira à mettre fin aux massacres des populations par les islamistes, quelle que soit la façon dont on raconte l’histoire.

Venance Konan




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