La presse ivoirienne, comme nous le mentionnions dans notre enquête du jeudi dernier, est en proie à une crise sans précédent. Les chiffres de vente des journaux sont mauvais voire très décevants. La situation de l’avis de certains lecteurs est en partie la résultante du contenu qui est servi par les journaux . Avant de se rendre au service le mardi 1er février 2022, Camara Souaté qui travaille à Filtisac, fait un saut dans un kiosque à journaux situé non loin du carrefour du marché du quartier Akeikoi-extension d’Abobo. En parcourant la Une des journaux, il remue de temps en temps la tête de la gauche vers la droite. L’homme avec qui nous avons échangé par la suite, trouve que les informations publiées en général par la presse ivoirienne, sont trop en rapport avec la politique..
Les publications jugées trop politiques
« Les informations des journaux ivoiriens sont trop politiques, trop partisanes. Elles sont proches des partis politiques. Ils ne publient pas assez d’informations relatives à l’intérêt du pays. Les journalistes proches de ces partis politiques sont plus préoccupés à produire des articles qui font l’apologie de leurs partis politiques. Or, il est avéré que les partis politiques agissent tous de la même façon. Ils ont tous le même mode opératoire. Dans l’opposition, ils promettent monts et merveilles aux populations. Mais à la pratique de la gestion du pouvoir d’Etat, les belles promesses fondent comme neige au soleil. Il ne sert donc à rien de les suivre dans leurs dires parce qu’ils viennent pour se préoccuper de leurs proches et d’eux-mêmes. Je ne crois plus aux hommes politiques, par conséquent je ne m’intéresse pas à eux. Je ne peux donc pas acheter des journaux qui passent le clair de leur temps à faire le culte de la personnalité de ces derniers », affirme l’air révolté ce dernier.
M.Houon Edouard
Son point de vue est partagé par Houon Edouard, retraité de son état. Il a décidé de mettre une croix sur les journaux politiques, au motif qu’ils ne disent pas la vérité. Pour lui, ces journaux ne sont pas en mesure de dire la vérité, quand les informations qu’ils doivent publier portent atteinte à la notoriété ou à l’image du leader du parti politique dont ils sont proches. Ils se comportent tels que des caisses de résonnance de ces partis politiques. Houon Edourd estime donc que les journalistes de ces formations politiques ne peuvent que produire des articles partisans. Qui ne sont par conséquent pas objectifs.
C’est d’ailleurs ces deux reproches fondamentaux que Me Fossou N’Dah Jules, avocat , fait à la presse ivoirienne. L’homme, qui s’est spécialisé dans l’aide à la création d’entreprises, dit être déçu de constater que les journaux ivoiriens sont excessivement partisans et qu’ils ne sont pas objectifs. Du coup, cet avocat se voit mal en train de dépenser de l’argent dans l’achat d’un quotidien, et se voir servir en retour des informations subjectives.
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D’autres personnes dénoncent la pauvreté du contenu des journaux. Pour elles, les sujets ne sont pas recherchés. « Certains journalistes sont devenus des bénis-oui-oui. Dans l’opposition, ils traitent de bons sujets. Ils sont beaucoup critiques à l’égard du pouvoir. Mais une fois au pouvoir, ce n’est plus le cas », explique cet enseignant. Aujourd’hui, il n’achète plus de journaux. Il se plaint du fait que les articles font l’éloge des hommes politiques. « Souvent ils mettent des titres attrayants à la Une des journaux. Mais Il n’y a rien de bon à l’intérieur. C’est toujours les mêmes politiciens qu’on voit sur les journaux. Finalement ça m’énerve », explique Nadia.
Un sérieux concurrent
A en croire aussi nombre de lecteurs, une grande partie des Ivoiriens optent aujourd’hui pour les informations en ligne, les réseaux sociaux. « Les informations sur internet sont facilement à ma portée. Quand je fais une souscription de 500 francs, j'ai la connexion internet pour une semaine », confie André. Il préfère donc ces informations sur le net et peu importe la qualité, que de se procurer un journal. Un autre confie qu’il préfère les informations sur internet, car c’est rapide. En plus, « les journalistes eux-mêmes vont chercher les mêmes informations sur le net. A quoi bon d’aller acheter un journal ? » Moussa abonde dans le même sens. Pour lui, en plus de la disponibilité en un temps record des informations, l’internet est beaucoup plus discret surtout avec son téléphone portable. Dr Gnonzion Célestin, enseignant-chercheur à l’Ufrica de l’université Félix Houphouët Boigny de Cocody, estime en effet qu’il faut prendre en compte dans les réflexions à mener sur l’état de la presse écrite en Côte d’Ivoire, l’avènement de l’internet. Cet outil de communication a entraîné la naissance des réseaux sociaux numériques et des applications comme Opera News. Ceux-ci offrent l’opportunité aux internautes de lire des articles gratuitement.
On le voit, l’internet est donc devenu un concurrent sérieux, voire un handicap pour les journaux. A cela, il faut noter que beaucoup d'Ivoiriens n’aiment pas lire, surtout les jeunes qui constituent une grande partie de la population.
Junior Jeremy,Diomandé Karamoko