Le sommet de N’Djamena, qui réunit depuis le 15 février dernier, les chefs d’Etat des pays du G5 Sahel, a refermé ses portes le 16 février 2021, dans la capitale tchadienne. Une réunion qui se termine sur une note de satisfaction, d’autant qu’outre les recommandations prises, le président français, Emmanuel Macron, a annoncé qu’il n’y aura pas de réduction des effectifs français dans la zone. L’autre annonce forte que l’on retiendra de cette rencontre au sommet des dirigeants de ces pays durement frappés par le terrorisme et faite par l’hôte de ce sommet, le président Idriss Déby, est l’envoi de 1200 soldats tchadiens dans le « triangle de la mort », aux confins du Mali, du Burkina Faso et du Niger. Une zone clairement identifiée, depuis le sommet de Pau, en France, comme le foyer le plus ardent d’activités de l’hydre terroriste qui semble y avoir durablement installé ses pénates pour mieux sévir dans la région. Il s’agira donc pour les « boys » d’Idriss Deby, de ne pas laisser de répit aux mauvais garçons du désert sur le terrain, et de continuer l’œuvre de Barkhane qui songerait à se consacrer désormais à la chasse au gros gibier en vue de chercher à décapiter la bête immonde.
On espère que les lignes vont bouger dans le sens d’une meilleure normalisation de la situation
Une nouvelle plutôt bonne pour les populations du Sahel d’autant que la réputation des soldats tchadiens en matière de bravoure dans la traque des terroristes, est loin d’être surfaite. Eux qui n’avaient pas hésité à poursuivre les djihadistes maliens jusque dans la forteresse des Ifoghas, au prix de leur sang. C’est pourquoi l’on espère que les lignes vont bouger dans le sens d’une meilleure normalisation de la situation, si cette annonce du chef de l’Etat tchadien est immédiatement suivie d’effets sur le terrain. Car, une chose est de prendre une décision, une autre est de la mettre en œuvre. Et généralement, ce ne sont pas les bonnes résolutions qui manquent, à l’occasion de ces rencontres au sommet entre dirigeants du continent sur des questions brûlantes d’actualité. Mais c’est leur mise en œuvre qui pose souvent problème.
En effet, quand ce n’est pas le nerf de la guerre qui fait défaut, ce sont d’autres considérations qui entrent en ligne de compte pour finalement renvoyer aux calendes… sahéliennes, la mise en œuvre de recommandations dont l’urgence et la pertinence ne souffrent pourtant généralement pas de débat. En témoigne, par exemple, l’opérationnalisation de la force conjointe du G5 Sahel entre-temps, perçue comme la panacée, mais qui reste pratiquement toujours cet albatros incapable de prendre convenablement son envol pour casser du terroriste et briser les reins de la bête immonde, pour le bonheur des populations du Sahel qui continuent de souffrir le martyre des exactions et autres tueries sauvages de la part de ces fauves assoiffés de sang. Et dans le cas d’espèce, il faut dire que cette promesse de l’homme fort de N’Djamena n’est pas nouvelle puisqu’elle date du sommet précédent, pour ne jamais connaître un début d’application pour les raisons que l’on sait.
Il s’agit maintenant de joindre rapidement l’acte à la parole
Notamment, un profond désaccord entre le Tchad et ses partenaires sur les conditions et les modalités pratiques de ce déploiement, auquel est venu se greffer une menace djihadiste de plus en plus pressante dans le bassin du Lac Tchad. Toute chose qui obligea le président Déby à une opération de « dératisation » interne à travers une mission commando d’envergure. C’est pourquoi l’on espère que les recommandations de ce sommet de N’Djamena, ne vont pas dormir dans les tiroirs. L’espoir serait encore plus permis si les partenaires qui ont promis depuis belle lurette de cracher au bassinet, se décidaient enfin à délier les cordons de la bourse pour donner plus de consistance aux ressources additionnelles annoncées par l’Alliance Sahel, ce regroupement d’une vingtaine de contributeurs aux projets de développement dans la région, qui « est arrivé à mobiliser trois milliards d’euros de ressources supplémentaires » dont « une partie, à peu près 40%, de ces trois milliards sont déjà en cours d’exécution », à en croire la présidente de l’Alliance, la ministre espagnole des Affaires étrangères, Arancha Gonzales Laya. C’est dire si à la solution militaire, la communauté internationale semble bien décidée à joindre l’arme du développement pour espérer venir à bout du terrorisme dans ladite région. Une solution qui, si elle était bien appliquée, pourrait contribuer à couper l’herbe sous les pieds des forces du mal en rendant la jeunesse moins vulnérable aux sirènes des terroristes, surtout si celle-ci venait à trouver son compte dans des occupations saines. C’est dire si la capitale tchadienne valait bien un détour pour l’ensemble des chefs d’Etat du Sahel et leurs partenaires engagés dans la lutte contre le terrorisme, au moment où l’araignée venimeuse cherche à étendre sa toile jusqu’aux pays du littoral, pour prendre en étau toute la sous-région ouest-africaine. Il s’agit maintenant de joindre rapidement l’acte à la parole, pour éviter de donner, tôt ou tard, raison à ceux qui pensent que N’Djamena n’aura été qu’un sommet de plus.
« Le Pays »