C’est le fait majeur qui a marqué la journée du jeudi 5 mars 2020. Devant le Parlement, réuni en congrès extraordinaire, Alassane Ouattara a annoncé qu’il ne sera pas de la course à la présidentielle de cette année. Une annonce pour le moins inattendue, qui a pris plus d’un de court, y compris dans son propre camp. Au point d’arracher des larmes à certaines personnalités de son parti, le Rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie et la paix( Rhdp).
En lâchant cette « bombe », le chef de l’Etat en désamorce une autre, celle de la fronde sociopolitique qui a commencé à enfler au point de faire sortir de ses gonds le clergé catholique. Depuis quelque temps, en effet, le climat sociopolitique devenait pesant : l’opposition donnait de la voix de plus en plus à travers meetings et déclarations. Une situation qui allait sans doute s’envenimer au fur et à mesure que l’on voyait poindre la prochaine présidentielle. En précipitant ainsi l’annonce de sa position sur son éventuelle participation au prochain scrutin présidentiel, Ouattara faire retomber le mercure.
Et comme le font remarquer bien des observateurs, il passe dans le même temps, un message aux deux autres mousquetaires que sont Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo : il les exhorte, à mots couverts, à imiter son geste en renonçant, eux aussi, à revenir au pouvoir. Au-delà du paysage politique ivoirien, l’annonce d’Alassane Ouattara se veut une invite à tous les chefs d’Etat africains encore tentés par la fascination du 3emandat.
Les 3 scénarii qui se profilent à l’horizon
Le vin étant tiré, il va falloir le boire. Autrement dit, Ouattara n’étant plus dans la course à la présidentielle de 2020, les acteurs politiques et les populations devront se préparer à toutes les éventualités qu’implique son retrait de la compétition qui s’annonce. Le premier scénario qui se dessine est celui où il manœuvre pour positionner un dauphin comme candidat à la présidentielle.
Adoubé par Ouattara, celui-ci pourrait gagner les élections si, bien sûr, les populations venaient à porter majoritairement leur choix sur ce candidat qui aura été oint par le Rhdp. Un tel scénario aura pour effet de préserver les acquis des années Ouattara mais aussi garantir à bien des profiteurs du régime en place, de jouir encore des ors et lambris du pouvoir pendant au moins 5 ans.
Dans un deuxième scénario, le candidat présenté par le Rhdp pourrait mordre la poussière devant un adversaire de l’opposition. Ce porte-flambeau du parti au pouvoir pourrait être desservi par des frictions voire une fracture dans la maison Rhdp, s’il se trouve qu’il a été imposé au mépris de tout jeu démocratique. Une situation qui pourrait instaurer un climat interne peu propice à la mobilisation de toutes les énergies en vue de l’atteinte de l’objectif ultime qui est la victoire à la présidentielle. Et donc risque de défaite.
En cas de déconvenue, il est peu probable que le Rhdp, né sur les cendres du Rassemblement des républicains( Rdr) ne soit pas en proie à une tourmente, avec pour conséquence la perte des avantages et autres privilèges dont jouissent nombre des tenants actuels du pouvoir. Et partant, une longue traversée du désert voire une descente aux enfers.
Le troisième scénario est un scénario à la congolaise. On pourrait se retrouver dans le cas de la République démocratique du Congo( Rdc) où le candidat qui aura été imposé par Ouattara, échoue à lui succéder à la tête de l’Etat. Mais même s’il venait à être défait, l’on s’arrangerait pour que le prochain successeur du président sortant ne soit pas issu de l’opposition significative c’est-à-dire de la coalition formée par le Pdci, le Fpi et autres. Dans ce cas, même en n’étant plus au pouvoir, le parti de Ouattara pourrait préserver certains acquis pour avoir pesé sur le choix du vainqueur proclamé mais non élu dans les urnes, qui présidera aux destinées de la nation.
Karine Koré
Publié le :
3 août 2020Par:
Forestier de Lahou