La 15e édition de la Foire Internationale du livre de Ouagadougou se tient sous le thème «la littérature et promotion de la paix et la sécurité ». La conférence inaugurale a été donnée ce vendredi 21 novembre 2019 par Laurent Bado, professeur et député à l’Assemblée nationale qui s’est entretenu avec le public sur « le rôle de l’écrivain dans la société ».
Le professeur Laurent Bado a non seulement capté son public, mais aussi l’a fait éclater de rire avec ses anecdotes souvent virulentes.
Avant de rentrer dans le vif du sujet, le député s’est étalé sur les principes d’une société viable. Pour qu’il ait la cohésion, il faut des lois mais des lois qui s’appliquent.
« Au Burkina Faso, on fait des lois mais des lois qui n’ont pas d’application. J’en ai compté jusqu’à 207 depuis 1957, dit-il. Mais même pas la loi sur le délit d’apparence n’est en application (…). Si j’étais président, chaque ministre allait me rendre compte des lois et son décret d’application qui ont été pris et concernant son département. S’il ne l’a pas fait, il va le regretter ».
Le second principe se base sur la justice car, dit-il, « on ne peut pas vivre ensemble heureux avec une justice à deux vitesses et le troisième, le partage des richesses. Mais encore qu’il ne faille pas louer les paresseux ».
C’est pour lui, des conditions cumulatives pour qu’une société soit viable et puisse se développer.
Cependant, il réfute le mimétisme. Chaque société a ses histoires. Alors que «nous copions platement les occidentaux », reproche-t-il.
«Je pense que mon fiston là (ndlr président) a la solution lui-même. En tant qu’individu, tu n’as pas ta personnalité ? Tu as besoin d’aller prendre quoi chez l’autre ? », s’interroge-t-il, avant de dire : « il est doux, il pardonne le mal qu’on lui fait, moi je suis vindicatif, je me mets vite en colère. Il y a ce qu’on appelle emprunter mais il ne faut pas emprunter ce qu’on appelle un principe de cohésion, chaque société avec son histoire ».
Puis, il revient à son sujet du jour, le rôle de l’écrivain dans sa société, puisque c’est de cela qu’il s’agit. L’auteur du « cahier d’un vacancier », dit avoir écrit pour expliquer pourquoi il s’engage en politique.
La première responsabilité de l’écrivain pour lui, est de parler et d’écrire pour dire quelque chose de sincère à ses frères et sœurs. « Le problème est que nous pouvons être des bourreaux de notre propre peuple. La responsabilité de l’écrivain, s’il a un message, ce message doit être conforme à la nature de notre âme. Quand on est un Africain, non seulement vous avez la responsabilité de parler et d’écrire à temps et à contretemps, mais aussi parler dans le sens des valeurs positives de la société », détaille-t-il.
Il ne s’attardera pas sur ce point. Sa casquette d’homme politique reprend le dessus. Il déroule sa vision pour avoir des élections peu coûteuses et objectives.
«C’est d’ailleurs mon programme politique, clame-t-il. On pourra faire des élections tous les jours, ça ne coûtera pas 1 million de F CFA ».
« Aux Etats-Unis, c’était le choix de critère capacitaire. Si tu ne sais pas lire et écrire, tu n’as pas le droit de voter. En France, il fallait payer ton bulletin de vote. Si tu es pauvre, si tu ne peux pas payer, tu ne peux pas voter. Mais en Afrique où plus de 80% de la population est analphabète, on applique le suffrage universel. Nos hommes politiques veulent maintenir le peuple dans l’ignorance. Tous les 5 ans, on vient leur donner les 2000 F CFA. Il faut les voix de ceux qui voient clair. Comment voulez-vous qu’un intellectuel ait un seul bulletin de vote qu’un boucher de Réo ?», développe-t-il.
Le fondateur du PAREN maintient qu’il a toujours la solution pour développer le pays. S’il s’agit des voies, il en a.
«Je vous ai dit, donnez-moi le Burkina Faso, je vous donne trente mois, je viens à la place de la nation pour qu’on me fusille si j’ai menti au peuple et je le dis en prenant fonction. Trente mois, pas plus », promet-il.
Mais hélas, le peuple ne lui accorde pas sa confiance ! Sa déception est encore grande envers les intellectuels, car pour lui, tous les grands intellectuels sont dans les grands partis, les partis « argentés ».
« Il faut que l’élite africaine soit sérieuse. Ils sont truffés de diplômes mais ils sont tous dans les partis qui ont de l’argent, déplore Laurent Bado. Pourquoi, ils ne viennent pas au PAREN ? Parce qu’il n’y a pas d’argent pour eux. Et ils ne peuvent pas être députés ni ministres facilement mais s’ils sont au MPP, au CDP, ils peuvent être ministres facilement ».
C’est après d’âpres discussions que le professeur prendra congé de son public en rappelant sa phrase d’introduction, «je vous avais dit que vous allez m’entendre mais pas me comprendre ».