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Culture

Chronique du web : De la prison au palais !

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Vous connaissez sûrement Agalawal, cet inénarrable humoriste ivoirien dont les One man shows sont autant de chefs-d’œuvre face auxquels je m’étrangle d’hilarité. Le scénario de son sketch sur les présidents et les prisonniers, deux catégories qui partagent très souvent les mêmes « honneurs » et « privilèges », serait-il en train de se jouer sous nos yeux en République Démocratique du Président ? En tous les cas, des indices suffisamment concordants nous inclinent à penser que Jean-Pierre Bemba n’est sorti de sa prison dorée de la CPI (Cour Pénale Internationale), à la Haye (Pays-Bas), que pour mieux arpenter le boulevard conduisant au Palais présidentiel de la Gombe. Le hasard qui s’invite très souvent dans le destin des nations a voulu que ce soit justement dans ce secteur de la mégapole de Kinshasa que la Famille Bemba possède de nombreuses résidences luxueuses. Même si l’accès à sa propriété la plus proche du Palais occupé par le président Joseph Kabila lui a été interdit par la police le mercredi 1er août 2018, on se demande bien pour combien de temps encore acceptera-t-il de rogner son frein tant la dynamique de hurricane sur laquelle il surfe depuis sa sortie de prison semble irrésistible et va balayer tout sur son chemin.

Depuis 17 ans que le fils de Laurent Désiré Kabila règne sans partage sur le Congo, il a su louvoyer pour gagner du temps. Mais, cette fois-ci, la messe est dite et c’est contraint et forcé qu’il se résout à tirer sa révérence pour jouir de son statut de sénateur à vie et de sa fortune colossale qui ferait pâlir Crésus en personne. Le 23 décembre prochain, les Congolais se rendront aux urnes pour tourner définitivement la page des années Kabila, père et fils, marquées par des guerres, des désastres, du gâchis et surtout le « glissement » régulier de l’agenda électoral.
Ils sont 23 prétendants à avoir déposé leur dossier pour espérer occuper le fauteuil tant convoité qui n’échoira, malheureusement, que dans l’escarcelle de celui qui aura un gros portefeuilles (en dollars et autres devises étrangères), de l’entregent local et des soutiens extérieurs. Il est évident que le cautionnement de 100.000 $ américain a découragé de nombreux autres candidats – plus jeunes – qui auraient aimé en découdre avec les mêmes qui peuplent le marigot politique local.
Les plus connus d’entre eux sont Vital Kamerhe, Martin Fayulu, Adolphe Muzito, Freddy Matungulu, Noël Tshiani, Félix Tshisekedi et naturellement le sénateur Jean-Pierre Bemba. Ces deux derniers sont les représentants d’écuries dans lesquelles la politique se transmet par le biberon. Quid du représentant du Front commun pour le Congo (FCC), la coalition au pouvoir en RDC ? Il s’appelle Emmanuel Ramazani Shadary,58 ans, fidèle parmi les fidèles au président Kabila qui a fait ses classes sur les bancs de l’Assemblée nationale (2006 et 2011) pour le compte de la circonscription de Kabambare, dans le Maniema. Jusqu’au jour de sa « nomination », il occupait les prestigieuses fonctions de secrétaire permanent du PPRD, le parti présidentiel. Il fut aussi vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur et de la sécurité. Mais ces références gouvernementales suffiront-elles à faire de lui le favori de la compétition ? Je n’ose pas m’aventurer sur un terrain tropical où des glissements – cette fois-ci au propre – mortels sont monnaie courante.
Demeure le cas Moïse Katumbi, opposant politique, riche homme d’affaires et ancien Gouverneur de la province du Katanga de février 2007 au 29 septembre 2015. Cet exilé qui partage sa vie entre les pays de l’Afrique Centrale, l’Afrique du Sud et l’Europe s’est fait aussi un nom dans le football en manageant victorieusement le TP Mazembé, un club phare de la RDC. Le pouvoir congolais est résolu à contrarier ses ambitions politiques par tous les moyens. A chacune de ses tentatives pour rentrer dans son pays, il est refoulé comme un malpropre comme si, doit-on s’interroger, il serait porteur de la souche à l’origine de la fièvre hémorragique à virus Ebola qui sévit régulièrement en RDC. La dernière obstruction à son retour au bercail date des 3 et 4 août, ce qui l’a empêché de déposer son dossier de candidature dans les délais impartis.
Mais ses conseils ne désemparent pas ; en effet, ils ont déposé plusieurs requêtes auprès du Conseil d’Etat aux fins qu’il puisse recouvrer totalement sa liberté de mouvement  d’une part, et qu’il soit autorisé à déposer son dossier en vue de la présidentielle du 23 décembre prochain.
Si le sort s’acharne contre Katumbi, il semble par contre ouvrir un boulevard à Bemba pour accéder à la magistrature suprême de la RDC. Il y a là, manifestement, un deux poids, deux mesures qui a besoin d’explication en lingala ou en swahili. Certes il ne nous appartient pas de juger la politique intérieure de pays souverains, mais le minimum serait de suivre à la loupe l’évolution de celle-ci et de comprendre les infortunes de l’un et la bonne étoile de l’autre que dix années passées en prison n’auront pas réussi à voiler.
Avec une marge d’erreur tolérable, on peut affirmer que le destin de toute une nation est en train de se jouer à l’aune de la saga d’une dynastie, celle des Bemba.
 
Serge de MERIDIO.
 



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