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Societe

La corruption ronge, ronge ....... dans tous les compartiments!

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Ça n'a pas été facile pour moi de l'avouer et de l'exposer sous l'Art à palabres. Moi, journaliste, censeur devant l'Eternel….... Vous savez, quand vous n'avez pas de réelles responsabilités, vous croyez avoir toutes les réponses à tous les problèmes. Vous croyez détenir toutes les vérités. 
En tout cas, moi, je suis journaliste, citoyen exceptionnel. C'est moi qui distribue les bons et les mauvais points. Ma voix retentit en écho au quotidien et fait trembler la République, ses gouvernants et ses citoyens. Je suis un pouvoir : le quatrième en son genre. Mais, comme dit le proverbe : « quand on veut grimper aux arbres, il vaut mieux avoir son cul propre ». Sous mes airs de probe, je cache une âme souillée. Je suis corrompu. Oui, perverti jusqu'à la moelle. Et je suis peut-être le pire de tous, parce que les effets de ma corruption sont plus dangereux, plus dévastateurs. Plus insidieuse et plus vicieuse, puisqu'elle agit directement sur la conscience. Et pour faire diversion, ma plume a vite fait d'épuiser le débat. Point final. Les corrompus sont tout trouvés : les autres, notamment les « corps à billets ». Les pauvres « poulets » ! Il faut toujours qu'on les sacrifie, à la moindre occasion. Non, mais ça suffit ! Aujourd'hui, le miroir me renvoie ma propre image. Mon Dieu, quelle hideur !
Maintenant, il me faut le dire, tout net. Sans fioritures : Mea Culpa ! Ma conscience aux relents fétides a pendant longtemps empuanti ma plume. Pire, la société tout entière. Coincé entre des pressions complexes et subtiles, face auxquelles je n'étais pas suffisamment armé pour résister. Comment alors revendiquer une indépendance ? Comment rester objectif et impartial, quand ces pressions me poussent chaque jour à de graves manquements. Je vis désormais accroché à des tiers, extorquant çà et là le prix de mon silence ou de mes éloges. 
Pourtant, quand je commençais ma jeune carrière, il y a à peu près une décennie, j'étais tout plein d'ambitions. Plein de rêves, avec des modèles de haut vol. Ceux-là, oui, c'étaient de vrais journalistes. Ils ont imposé respect, par l'immensité de leur culture… 
Journaliste donc, je faisais mes armes dans un magazine dit culturel. Abusivement et pompeusement. J'étais entouré d'anciens gratte-papiers qui n'hésitaient pas à exhiber fièrement leur butin du printemps de la presse. Et c'est comme ça que j’ai été dérouté. Jugez-en vous-mêmes. 
A la demande de mon chef, j'ai rédigé une série d'articles sur une exposition d'oeuvres  d'art. L'expo se tenait au siège d'une grande banque de la place. A la fin, mon chef, manifestement satisfait, me fit cadeau d'un petit billet. Grand geste de gentillesse. N'allez pas croire autre chose. Incapable de rendre la sonorité des œuvres exposées, je me suis évertué à pondre de grossiers publi-reportages. J'ai appris, bien après, que notre Red'chef était en train de négocier un gros emprunt auprès de ladite banque, ce qui expliquait cela. Pauvre de moi ! 
Initié à la pratique, j'en fis ma principale activité. Un petit commerce honteux mais juteux : articles alimentaires, règlements de comptes, flagorneries, chantages, etc. En bon élève, j'ai reproduit le schéma. Mon énergie éthique s’est littéralement altérée. Devenu vulnérable aux espèces sonnantes, mon potentiel critique s'est également effondré. Eh bien oui ! N’est-ce pas que pour neutraliser un journaliste, la corruption est plus efficace que la censure ? Là où la menace stimule le courage, la corruption anéantie toutes les forces. Elle paralyse l'esprit. Mais en fait, qui lancerait-il le premier la première pierre ? 
Inexorablement, j'ai ainsi conduit mon esprit vers une mort certaine, une neogonie, comme dirait l'autre. Sur des sujets d'intérêt national, et pour des raisons inavouées, je fournissais des témoignages partiels et partiaux. 
Naturellement, dans une société où l'immoral a pris la place de la morale, où l'anormal s'est substitué au normal, il est facile de ne pas être un héros. Surtout que, moi, j'avais une bonne excuse. Mes conditions déplorables de travail. Et pire, j'étais payé au lance-pierre. Qu'est-ce qu’il y a de plus dégradant ! A partir de là, je suis devenu un journaliste gombo. Je choisis les reportages non pas à la pertinence du sujet mais au poids de l'enveloppe. Le fameux perdiem. Codifié. Inscrit dans les mœurs et dans les registres. Pas de perdiems, pas de papiers. Et bien souvent, j'empoche le « diem » et je n'écris pas l'article. Oh, mais ce n'est pas trop grave ! Ce n'est pas ça l'essentiel… A la Tour bleue, le schéma est presque identique. Avec un argumentaire des plus ahurissants : « on doit gagner plus parce que nous on a le son et l'image en même temps ». S'ils sont d'humeur professionnelle ce jour, ils arriveront en milieu de cérémonie et, avec un peu de chance, une caméra en main. Et le chauffeur a fini, lui aussi (qui est fou ?), par exiger sa part de « diem ». N'est-ce pas qu'ils forment une équipe… de reportage ?
Une anecdote pour terminer. Une histoire presque vraie qui a achevé de me convaincre sur l'une des plaies dont souffre notre presse. Une histoire dont les conséquences auraient pu être dramatiques… pour la population. 
Une amie à moi, consommatrice invétérée de friandises, découvre un cafard (un vrai) dans un sachet de jus de fuit industriel vendu à la sauvette dans Abidjan. Le fabriquant est une grande entreprise sise à Yopougon. L'émotion et la colère passées, mon amie juge nécessaire de prévenir la presse qui - sait-on jamais - estimera utile d'avertir ses lecteurs-consommateurs. Elle porte donc les faits à son ami journaliste que je suis. Pour une fois, je tenais un bon sujet. J'en informe mon chef chargé des faits divers. Il considère l'affaire d'importance. Il est lui-même consommateur, et sa famille aussi. Mon chef, à son tour, informe un chef au-dessus de lui. Comprenez ! Les rédactions sont très hiérarchisées. Cet un peu-plus-que-chef trouve le sujet intéressant. Il pense déjà au gros titre à la Une : « Un cafard dans un… » Il jubile : demain, on va vendre, mon petit.
Vient le moment rituel de la journée où tous les sous-chefs de quelque chose (Vous ne le savez peut-être pas, mais les rédactions sont aussi de véritables armées mexicaines) viennent défendre ce qu'ils ont sous la dent et où un chef, un peu plus-chef-que-les-autres, décide de ce qui est d'importance et de ce qui ne l'est pas pour le journal du lendemain. Le sous-chef chargé des faits divers est content. Il est sûr d'avoir le meilleur papier du jour. Un papier qui vaut dix fois la Une. Mais le plus-chef-que-les-autres n'est pas de cet avis. A la surprise générale. Il estime même qu'il ne faut rien publier sur le sujet. Rien du tout. Ni à la Une ni ailleurs. Nada ! Ce n'est pas notre rôle de créer la panique, s'est-il justifié. Un sous-chef courageux et, quand même, ambitieux, choqué par une telle décision, va cafter l'affaire au sur-chef-au-dessus du plus-chef-que-les-autres. L'ambitieux sous-chef revient avec une mine de deuil. Il n'y aura pas une seule ligne sur ce fait divers. Affaire classée. C'était vraiment à s'étrangler de rage.
La fin de cette triste histoire a montré que notre plus-chef-que-les-autres et son sur-chef sont, en prime de leur boulot officiel, les rédacteurs attitrés et appointés du bulletin de liaison de la grande entreprise en question. Et grassement payés. N'est-ce pas qu'ils méritaient bien leur salaire ?
Le plus-chef-que-les-autres et son sur-chef sont toujours dans la presse. Ils sont même montés en grade depuis. D'ici, je vois la tête qu'ils vont faire en revisitant ce souvenir… Quant à moi, j'ai fini par quitter le milieu….... Avec des regrets, certes. Mais rassurez-vous, je ne me suis jamais porté aussi bien que maintenant. 
A très bientôt !
Serge GRAH »



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