publicité

Societe

Obama à Paris: le bon coup du PDG d’Orange

Publié le :

L’ex-président américain sera en conférence le 2 décembre, invité par le club Les Napoleons. Un événement en grande partie financé par Orange, dont le patron, Stéphane Richard, est en  campagne pour un nouveau mandat.

Pour se poser en PDG international, puissant dirigeant d’entreprise à l’aise avec les grands de ce monde, il pouvait difficilement faire mieux. Le 2 décembre, dans un amphithéâtre de la Maison de la radio à Paris, Stéphane Richard, patron d’Orange, papotera avec Barack Obama. Pendant une heure, l’ex-président américain, dont la parole est rare depuis son départ de la Maison Blanche, répondra aux questions de son interlocuteur sur les thématiques de la peur et de l’innovation («Fear less, innovate more» est le titre de son intervention).L’événement privé, réservé à un parterre d’initiés, est organisé par la communauté Les Napoleons, dont Stéphane Richard est le parrain et Orange l’un des principaux «partenaires» financiers. «Quand Les Napoleons ont eu l’idée d’inviter Obama, ils avaient besoin d’une caution d’envergure, de quelqu’un de connu, pour lui tenir le crachoir»,raconte Béatrice Mandine, directrice de la communication d’Orange, pas mécontente de réaliser ce gros coup. On imagine que d’autres créateurs de ces conférences pour hauts cadres qui pullulent ont déjà dragué Obama et se sont cassé les dents.
En apprenant la tenue prochaine de cette «conversation», le petit monde des affaires a rigolé et/ou applaudi, s’est félicité et/ou étranglé - selon l’opinion qu’ont les uns et les autres de Stéphane Richard. Mais la plupart ont interprété la chose ainsi : le PDG d’Orange, dont le mandat à la tête de l’opérateur télécoms aux 40 milliards d’euros de chiffre d’affaires arrive à échéance au printemps 2018, lance sa campagne de réélection. Et le fait par un coup de com dont ses rivaux potentiels - une candidature de Nicolas Dufourcq, directeur général de la Banque publique d’investissement et ex de France Télécom, fait partie des rumeurs récurrentes - n’osent sans doute même pas rêver.

Réseau et business

«Cela ne tombe pas mal», euphémise Béatrice Mandine, alliée de Richard dans cette course au renouvellement pour quatre ans. Elle vante au passage le «carnet d’adresses de la mort» de son boss, ex-directeur de cabinet de Christine Lagarde au ministère de l’Economie, qui pourrait être bientôt renvoyé en correctionnelle dans le cadre de l’affaire Tapie. Mais la dircom d’Orange tempère l’intentionnalité du calendrier : «Il y a parfois des hasards heureux. Ce n’est pas notre idée, c’est celle des Napoleons. Nous les avons seulement aidés.» D’après l’histoire officielle, l’association a pris contact avec le cabinet d’Obama alors qu’il était encore président. La dircom et le PDG d’Orange seraient rentrés dans la boucle dans la dernière ligne droite, intégrant la petite équipe travaillant à la venue du prestigieux invité.
A l’origine des Napoleons, nom rendant hommage au «grand innovateur» qu’était l’empereur selon eux, deux hommes issus du secteur de la communication, qui se sont rencontrés au sein de l’ex-agence RSCG (fondue dans Havas depuis) : Mondher Abdennadher et Olivier Moulierac. Deux «pubards» qui, dans la discussion, emploient des mots comme «meet up» et «silotique» et lâchent des punchlines telle «notre principal actif est de ne pas avoir de passif». Avenants, très appréciés dans le milieu de la com, ils parlent de leur projet, lancé en 2014 et porté par leur société Momentum, comme d’un «réseau social» mêlant rencontres physiques et échanges numériques pour une communauté d’«académiciens». Soit 1 500 personnes, selon les fondateurs, dont 500 réellement actives. Beaucoup sont des cadres œuvrant dans les médias et la technologie, mais on trouve aussi des chercheurs, des intellectuels, des financiers… Son «board», également qualifié de «collège inspirationnel» par Abdennadher, est présidé par la communicante d’Image 7 Anne Méaux et accueille l’ex-ministre de la Culture Fleur Pellerin, le numéro 2 de France Télévisions, Xavier Couture, ou encore l’entrepreneur Henri Seydoux.
«C’est de l’événementiel classique, explique un «académicien» peu impliqué. On paye pour être présents, rencontrer nos pairs, réseauter dans un environnement agréable. Des annonceurs, des agences, des acteurs de l’écosystème de la communication sponsorisent pour avoir leur nom associé aux événements.» En clair, Les Napoleons est un cercle de pouvoir, un club, un cénacle, comme il en existe beaucoup au sein de l’élite parisienne, à l’image du Siècle ou de l’Union interalliée. Celui-ci revendique toutefois une focalisation sur «l’innovation à la française», s’interrogeant sur la possibilité de «créer de la valeur en ayant des valeurs» et défendant une «vision du progrès» qui passe par «l’hybridation des communautés», selon les mots d’Abdennadher, pas toujours limpides. Moulierac est plus cash : «La fonction essentielle de notre projet est de mettre des gens talentueux en relation. C’est un lieu de business et c’est totalement assumé de notre part.»
Pour l’instant, le duo monte deux événements de trois jours par an, l’un en janvier à Val-d’Isère, l’autre en juillet à Arles. Au programme : «conférences, workshops, masterclasses», repas en petits comités et forfaits de ski pour la session d’hiver, dont la prochaine aura notamment pour «speakers» le philosophe Michael Fœssel ou l’ancien directeur de la DGSE Alain Juillet. L’été dernier, François Hollande est venu discourir à Arles. Un gage de crédibilité qui, d’après Moulierac et Abdennadher, a joué dans le oui d’Obama. «Leurs événements sont des bijoux», vante Anne Méaux, qui les apprécie parce qu’ils réfléchissent à la «transformation du monde». Un autre ponte de la com, qui ne veut pas être cité : «Les Napoleons sont originaux parce qu’ils mettent du contenu dans leurs événements, là où le secteur de la pub a plutôt l’habitude d’organiser des trucs pour s’attribuer des prix et des récompenses.» Le contenu a un prix : 3 400 euros par participant pour la session à Val-d’Isère à venir. Mais cela comprend le bonus surprise Obama à Paris.

400 000 euros

A quel tarif le Prix Nobel de la paix a-t-il accepté l’invitation des Napoleons ? «Pas de commentaire», répondent Olivier Moulierac et Mondher Abdennadher, tenus par de stricts accords de confidentialité. «Je ne sais pas, élude Béatrice Mandine. Il n’y a pas de contrat avec Orange. Ce sont Olivier et Mondher qui ont signé.» Cette semaine, le Canard enchaîné a écrit, sans citer sa source, que la facture s’élevait à 400 000 euros. Le montant ne tombe pas du ciel : c’est le prix auquel Obama a donné une conférence devant un fonds d’investissement de Wall Street au printemps, selon la presse américaine. Surtout, le Canard affirme que la note a été réglée par Orange, accréditant la thèse du coup de com personnel de Stéphane Richard. L’opérateur télécoms, dont l’Etat est toujours le premier actionnaire, dément et rappelle avoir un simple partenariat annuel de sponsoring avec la petite entreprise d’événementiel. Comme EDF, SNCF, La Poste, American Express ou Richard Mille. «Tous les partenaires ont mis à la poche pour faire venir Obama», affirme un proche de Stéphane Richard, sous couvert d’anonymat. Une rallonge collective pour l’occasion ? «C’est faux, on n’a rien payé de plus, conteste le dirigeant d’un des cinq autres partenaires, par ailleurs élogieux sur Les Napoleons. La venue d’Obama, je l’ai apprise la veille de l’annonce officielle. Je n’en sais pas grand-chose. Mais on a une poignée d’invitations, Orange en a plein. Cela ressemble à un truc à la gloire de Stéphane Richard.»
Quoi qu’il en soit, Les Napoleons ne semblent pas avoir les moyens de financer eux-mêmes un événement à 400 000 euros - hors frais d’organisation. Anne Méaux le dit elle-même avec beaucoup de franchise : «Il n’y a pas beaucoup de pognon» dans la boîte. Comme beaucoup de start-uppers prônant l’horizontalité et la collaboration, les fondateurs de ce «réseau social» restent très discrets quand on entre dans le dur : ils ne dévoilent ni leur chiffre d’affaires ni leur budget. Depuis la création de leur société Momentum, ils ont ouvert le capital à des actionnaires minoritaires, dont le publicitaire Jacques Séguéla, pour un total d’un peu plus de 200 000 euros. Après le coup Obama, Olivier Moulierac et Mondher Abdennadher ambitionnent de réaliser une nouvelle levée de fonds pour financer leurs projets de développement, dont «une villa Médicis de l’innovation» à Arles. De quel montant ? Mystère, là encore. Mais le but, selon les fondateurs, est d’être dans cinq ans «a human oriented innovation enabler through social media and knowledge». On n’est pas certain de pouvoir traduire l’expression.
Jérôme Lefilliâtr



publicité

FIL INFO

23 avril 2024

Masisi: des voyageurs et commerçants confrontés aux diverses exactions du M23 et Wazalendo

23 avril 2024

Trump a «comploté» pour «truquer» l’élection de 2016, selon les procureurs à son procès

23 avril 2024

Tombouctou, le redoutable criminel terroriste Alkalifa Sawri neutralisé par les forces armées

23 avril 2024

Mardi 23 avril 2024 : Journée Mondiale du livre et du droit d'auteur

23 avril 2024

Meurtre d'une danseuse du Coupé-Décalé à Yopougon : Un individu de 18 ans présumé auteur



Fanico

Lamine KANE. 13 février 2024
Conte des faits renversants
Valer St Clair 9 février 2024
CAN : Non aux courses d'autorités sur la pelouse !
Dr. Yalamoussa Coulibaly 6 février 2024
Diversité de noms chez les Sénoufo
Emmanuel Koffi 17 janvier 2024
Lettre ouverte au Premier Ministre Robert Beugré Mambé

publicité