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Des blessures toujours à vif en RCA

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Le nouveau gouvernement centrafricain peine à mettre un terme à trois ans de guerre et de violences sectaires. Son autorité est affaiblie par les attaques continuelles menées contre les civils par les rebelles de la Séléka – des musulmans, pour la plupart – et leurs rivaux des milices chrétiennes anti-balakas.
Six mois après l’élection de Faustin-Archange Touadéra, le premier président démocratiquement élu par les Centrafricains depuis trois ans, les plans annoncés par le gouvernement pour la réforme du secteur sécuritaire, la réconciliation et la réintégration des groupes armés dans la société sont contrariées par les effusions de sang qui continuent de se produire.
Le 12 octobre, des rebelles de la Séléka – une coalition de groupes insurgés du Nord – ont tué 30 personnes lors d’une attaque menée contre un camp de personnes déplacées situé dans la ville de Kaga-Bandoro, au centre du pays.
Les rebelles ont poignardé et tué à l’arme blanche des habitants du camp, qui avaient déjà perdu leur foyer à la suite d’autres violences. Les médias locaux ont dit qu’il s’agissait de représailles pour le meurtre de quatre jeunes musulmans survenu peu de temps avant dans la ville.
Les soldats de maintien de la paix des Nations Unies basés à Kaga-Bandoro ont abattu 12 des attaquants.
Le mois dernier, le même groupe de rebelles a mené un raid contre le village de Ndomete, à 15 kilomètres de Kaga-Bandoro, tuant au moins six personnes.
L’espoir s’estompe
L’élection de M. Touadéra a suscité de grands espoirs, mais la RCA demeure aujourd’hui une nation profondément divisée. Dans de vastes régions de ce pays riche en minerais, mais profondément pauvre, l’autorité du gouvernement est contestée.
En 2013, les rebelles de la Séléka ont réussi à prendre le contrôle de la capitale, Bangui. Le coup d’État a entraîné l’établissement d’une administration intérimaire.
Dans ce pays où 80 pour cent de la population est chrétienne, les mauvais traitements commis par la Séléka contre les civils ont entraîné l’émergence de groupes d’autodéfense, les « anti-balakas », et provoqué une vague de violences sectaires.
Dans des enclaves de non-droit comme celle de Kaga-Bandoro, la Séléka contrôle les routes, érigeant des barrages routiers et extorquant de l’argent aux habitants.
La violence et l’intimidation ont contraint les travailleurs humanitaires à suspendre certains programmes dans la région de Kaga-Bandoro, même si les besoins humanitaires y sont criants. En conséquence, plus de 120 000 personnes ne reçoivent plus de vivres, de soins de santé et d’instruction et ne bénéficient d’aucun autre service d’aide.
« On se fait voler en moyenne une fois par mois sur les routes », a dit à IRIN Kathy Kabeya, chef de mission en RCA pour l’organisation humanitaire INTERSOS. « Nous sommes dans une région où l’État n’a aucune autorité. Les groupes armés imposent donc des taxes. »
Le 29 septembre, Fabrizio Hochschild, le coordonnateur humanitaire des Nations Unies en RCA, s’est rendu à Ndomete pour entendre les préoccupations de la communauté. Il est arrivé dans le village dans un convoi composé d’une dizaine de véhicules.
Le principal problème évoqué était l’absence de sécurité.
« Il y a deux semaines, les anti-balakas sont venus dans notre village et nous ont dit qu’ils nous protégeraient. Nous n’avions rien à faire avec eux », a dit Gerard Mambissi à M. Hochschild. « Mais les Séléka de Kaga-Bandoro l’ont appris et ils sont venus. Ils ont tout volé et plusieurs personnes ont été tuées. »
M. Mambissi a fui dans la brousse avec ses enfants. Il a attendu près d’une semaine que la situation se calme avant de rentrer chez lui.
La faute aux soldats de maintien de la paix
Les habitants de Ndomete ont cependant aussi critiqué le contingent de la mission de maintien de la paix des Nations Unies en RCA, la MINUSCA, présent sur place, même si ce dernier a repoussé l’attaque survenue la semaine dernière à Kaga-Bandoro.
Les Casques bleus déployés dans la région sont originaires du Pakistan, et les locaux disent qu’ils ont naturellement tendance à se montrer plus favorables aux rebelles de la Séléka parce qu’ils sont musulmans.
Ce genre de méfiance sectaire est omniprésente en RCA, un pays encore fortement polarisé trois ans après le coup d’État de 2013, et il suffit de peu pour que les communautés se dressent les unes contre les autres. L’assassinat d’un haut gradé de l’armée dans le quartier majoritairement musulman du PK5, à Bangui, survenu le 3 octobre dernier, a déclenché des représailles qui ont fait au moins 12 victimes.
Cinq hommes ont été brûlés vivants ou lynchés simplement parce qu’ils étaient des Peuls, un groupe ethnique présent dans le nord musulman du pays.
Lenteur du processus de démobilisation
Plus de 384 000 personnes sont toujours déplacées par les violences en RCA et au moins 80 pour cent de la population musulmane a fui le pays. La réconciliation et le retour des habitants dans les vieux quartiers ayant fait l’objet d’un nettoyage ethnique demeurent douloureusement lents.
« Les hostilités entre les milices anti-balakas, les rebelles de l’ex-Séléka, les groupes d’autodéfense musulmans armés et les autres groupes armés, ainsi qu’entre les soldats de maintien de la paix internationaux et ces groupes, continuent de faire peser une menace sur les populations », selon un rapport publié en août par le Global Centre for the Responsibility to Protect.
L’Armée de résistance du Seigneur ougandaise (Lord’s Resistance Army, LRA) a également exploité le vide sécuritaire pour étendre ses opérations dans les régions isolées du sud et de l’est du pays.
Le rapport a appelé les Nations Unies et les troupes françaises qui sont toujours sur le terrain à « désarmer de force les groupes qui continuent de menacer les populations. La MINUSCA doit s’assurer qu’elle déploie un nombre adéquat de soldats dans toutes les régions où des civils vulnérables ne bénéficient pas d’une protection suffisante ».
Mais le programme de démobilisation prévu de longue date rencontre beaucoup de résistance. Ainsi, à la suite des plus récentes violences commises dans le quartier PK5, les groupes anti-balakas se sont réunis pour déterminer s’ils souhaitaient toujours participer au programme du gouvernement.
Après trois heures de discussion, ils ont décidé de ne pas se retirer du programme de démobilisation. Mais si les groupes de la Séléka exigent la partition des parties du pays qu’ils contrôlent, « nous devrons réagir », a dit Patrice-Edouard Ngaissona, un leader anti-balaka.
Les anti-balakas souhaitent aussi qu’on leur garantisse qu’ils seront intégrés dans l’armée et qu’ils auront leur mot à dire dans le processus décisionnel gouvernemental – deux demandes que le gouvernement a déjà rejetées.
Cette méfiance ainsi que l’anarchie permanente qui règne en RCA laissent peu de place à l’optimisme. Il semble en effet peu probable que le gouvernement réussisse à mettre fin aux divisions dans un avenir rapproché.
 



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