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Au Cameroun, plusieurs villes anglophones font journée « ville morte »

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Ils avaient menacé de débuter un mouvement général si le gouvernement continuait d’ignorer leurs revendications. Ils l’ont finalement fait. Le lundi 9 janvier était jour de rentrée scolaire pour le compte du deuxième trimestre au Cameroun. Après deux semaines de congés, élèves et enseignants devaient regagner les salles de classes. Seulement, au Nord-Ouest et Sud-Ouest, les deux régions anglophones du pays en crise depuis plus d’un mois, les salles de classes sont restées vides pour cause de « ville morte », décrétée par les syndicats d’enseignants et d’avocats.
 « Il n’y a pas eu école. Les boutiques et les bars sont vraiment vides. Il y a beaucoup de policiers, de gendarmes et de militaires dans les rues », assure une journaliste, jointe par téléphone, qui ajoute qu’elle n’a pas pu se rendre à son travail par crainte de « se fairetirer dessus dans la rue ».
« Je viens d’arriver à Bamenda [chef-lieu de la région Nord-Ouest], en passant par Buéa [chef-lieu de la région Sud-Ouest], Kumba, Mamfe et Batibo pour vérifier. Il n’y a pas école, les boutiques et autres espaces étaient ferméspas de taxis et de personnes dans les rues », jubile Me Félix Nkongho Agbor, président de l’Association des avocats du département du Fako (Sud-Ouest), par ailleurs président du consortium constitué des syndicats des enseignants, des avocats et de la société civile de la partie anglophone.
« Le gouvernement n’écoute pas »
Avant de passer à cette « méthode forte », les grévistes avaient posé un ultimatum au gouvernement avec lequel aucune négociation n’a abouti jusqu’ici : libérer toutes les personnes interpellées lors des violences du 21 novembre et 8 décembre 2016, avant la relance des discussions. « Mais, comme toujours, le gouvernement ne nous écoute pas. Ces jeunes sont encore à Yaoundé. Beaucoup parmi eux sont gravement malades, soupire Wilfred Tassang, secrétaire général de la Cameroon Teachers Trade Union (CATTU), l’un des syndicats des enseignants en grève. Tant que nos revendications ne seront pas prises en compte, nous n’allons pas arrêter notre grèveIl faut qu’on cesse de nous marginaliser»
Les anglophones en colère ne veulent plus des professeurs francophones qui enseignent l’anglais à leurs enfants alors qu’ils ne maîtrisent pas la langue, ils ne veulent plus des médecins francophones dans leurs hôpitaux et exigent les déclarations d’impôts et autres documents administratifs ne soient plus conçus qu’en langue française et que leurs conditions de vie s’améliorent.
De leur côté, les avocats dénoncent la non-traduction de lois et de documents juridiques en anglais au moment de leur publication (Code pénal, Journal officiel OHADA) et la nomination de juristes qui ne maîtrisent pas la langue anglaise dans les deux régions anglophones.
« Les sous-citoyens »
Lors de son traditionnel discours de fin d’année à la nation prononcé le 31 décembre 2016, Paul Biya, président de la République, avait qualifié ces grévistes de « groupe de manifestants extrémistes, manipulés et instrumentalisés ». « Les anglophones sont les sous-citoyens de ce pays. C’est comme si on était en période de colonisation. Pour exemple : il y a eu des incidents à Bamenda et on emprisonne les interpellés à Yaoundé », s’énerve Me Harmony Bobga. Au bout de neuf minutes de conversation téléphonique, le président de l’Association des avocats du Nord-Ouest finit par éclater en sanglots.
 « C’est un moment très difficile pour nous les anglophones. Durant mes études au Nigeria, j’ai vécu beaucoup de batailles, mais, aucune aussi violente que celle que nous vivons actuellement dans notre propre pays, explique la voix tremblante. Selon mes propres investigations, cinq personnes sont mortes depuis le début des violences. Elles n’étaient pas dans les rues. Elles n’avaient pas d’armes. Un adolescent de 17 ans est mort alors qu’il allait puiser de l’eau. De nombreuses personnes ont été gravement blessées. »
Pour John Fru Ndi, président du Social Democratic Front (SDF), principal parti d’opposition dont le fief est Bamenda, le gouvernement doit « vraiment écouter la peine » des enseignants. « Aujourd’hui, les rues étaient vides et les écoles aussi. Seules les forces de l’ordre étaient là avec leurs armes, déplore-t-il. Lorsqu’on est malade, on va vers un docteur qui écoute et prescrit ce qui peut vous guérir. Vous prenez cette ordonnance et retournez l’appliquer. Si ça ne marche pas, vous revenez. Or, dans le cas présent, le gouvernement dit qu’il n’y a pas de problème, ce qui est grave. » Un gouverneur qui n’a pas souhaité répondre aux questions du Monde Afrique.
Mutisme du gouvernement
Face au mutisme du gouvernement – dont le porte-parole et ministre de la communication Issa Tchiroma Bakar n’a pas non plus souhaité répondre aux sollicitations du Monde Afrique –, certains anglophones réclament l’indépendance pure et simple des régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest. Les plus modérés sont portés vers le fédéralisme, instauré le 1er octobre 1961, soit un an après l’indépendance pour respecter l’histoire du pays qui fut administré après la première guerre mondiale par les Français et les Anglais. Un mode de gouvernance abandonné après le référendum du 20 mai 1972 qui vit la création de la République unie du Cameroun et consacra cette date fête nationale sur l’étendue du territoire.
Le patron des Enseignements secondaires dans la région du Nord-Ouest, Victor Yewoh Mombakued, qui a suivi la journée « ville morte » avec inquiétude, pense qu’une « solution » doit être trouvée. « Je suis optimiste. Si on arrête la grève à temps, les enfants pourront rattraper les cours perdus, assure le délégué régional des enseignements secondaires. Les enseignants pourront faire des heures supplémentaires et les dates des examens officiels pourront être repoussées. »
Josiane Kouagheu

 



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